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                                  FELIBRIGE                                       95
M. le maire de Saint-Raphaël, accompagné des membres de la commission d'or-
ganisatio n des fêtes, était venu le samedi au-devant desFélibres, et un punch d'hon-
neur leur était offert au Cercle des Chasses et Régates. Le lendemain, après les
aubades données par les tambourinaires provençaux et par l'excellent orphéon
de Saint-Raphaël, un grand banquet servi dans la grande salle de l'hôtel des Bains
réunissait plus de cent convives, parmi lesquels plusieurs dames, dontM m e H. G.
et M I l e de V. avaient, par une attention délicate, revêtu le gracieux costume
des filles d'Arles.
   Après le repas, commence la cérémonie de « la Coupe ». Le Maître apporte un
superbe hanap en argent ciselé, y trempe ses lèvres, et prononce au milieu de
l'émotion générale un de ces discours superbes qui vous remuent au plus profond
du cœur. Il exprime ses remerciements de l'accueil qu'il a reçu, et disant que
les Félibres et lui étaient heureux d'apporter leur concours au progrès de cette
ville charmante, en chantant ses beautés, de même qu'autrefois Orphée et Am-
phion présidaient, la lyre en main, aux destinées des villes nouvelles, il boit à
la prospérité de cette belle province de VEmpire du Soleil et à la santé de son
maire, M. Félix Martin.
   Puis la coupe circule de main en main, et chaque convive dit à son tour une
pièce de poésie, un toast, une chanson. M. Martin, dans une chaleureuse impro-
visation, exprime sa reconnaissance à Mistral et à tous les Félibres d'avoir bien
voulu répondre à l'appel de la population de Saint-Raphaël. Il dit combien il est
touché de ce qu'il a entendu, delà conviction ardente qui réunit tous ces poètes,
et porto la santé du grand poète, du grand patriote Frédéric Mistral.
   Il nous est malheureusement impossible d'énumérer les remarquables toast
portés par les membres de cette belle réunion. Nous nous bornerons à citer ceux
de M. H. Guillibert, d'Aix, à Alphonse Karr, le Christophe Colomb de Saint-
Raphaël; de M. Louis Docteur, consul à Nice, à Mistral et à l'exemple élevé
qu'il nous donne ; de M. Léon Bouyer, qui, dans une allocution très spirituelle et
très applaudie a mis aux pieds du Maître les hommages de la commission chargée
d'organiser ces fêtes; de M. Paul Mariéton aux prosateurs du félibrige et à leur
extension future, suivi de sa poésie française la Vénus de Milo, symbolisme de
la renaissance provençale. On entendit également deux admirables pièces de
M. Marin : li Pantai et lou Cant de Marsiho, des sonnets de MM. Bourrelly,
Gaut, Michel, félibres, de M" 0 de Santeuil, e t c . . Nous ajouterons que pendant la
cérémonie de la Coupe, l'orchestre de la Société des Concerts si remarquablement
dirigé par Charles Carré ; les deux orphéons : l'Écho de Saint-Raphaël et l'Echo
de Fréjus, sous l'habile direction de M. Habay, et chantant, réunis, un très beau
chant provençal, ont tour à tour charmé l'auditoire.
   Le soir, séance littéraire dans la salle du théâtre du Casino brillamment illu-
minée; un remarquable discours de M. Michel, syndic de la Maintenance de
Provence; une adorable poésie : La Communion des Saints, dite par Mistral;
M. Pierre Barbier, fils 'de l'auteur dramatique Jules Barbier, lit au Maître une
très belle composition poétique, que des applaudissements unanimes accueillent.
Mistral, profondément touché, remercie et embrasse avec effusion le jeune poète ;
deux pièces pleines d'esprit et d'humour dites par M. Roumieux, félibre de Mont-
pellier, avec une verve étonnante, et d'autres poésies remarquables récitées par
leurs auteurs, forment un programme des plus attrayants, applaudi avec enthou-
siasme par une assemblée que la salle suffit à peine à contenir.