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412                       LA REVUE LYONNAISE
 Lorraine, Diane de Poitiers, même la sombre Catherine de Médicis sont les prin-
 cipaux curieux de ce temps; Henri IV et Gabrielle d'Estrées se plaisent aussi à
avoir des collections, la province en compte aussi un grand nombre, et parmi
ces dernières, il est juste de citer celles du lyonnais Grolier, le splendide et il-
lustre bibliophile. M. Bonnaffé s'est bien gardé aussi de passer sous silence les
curieux des temps suivants et du dix-huitième siècle et dont plus d'une collec-
tion, comme celle de Philippe Egalité, était d'une incomparable richesse, mais qui
passa en Angleterre au moment où la Révolution spolia le clergé, la noblesse
et jusqu'aux plus humbles curieux, de leurs biens, de leurs trésors et' de leurs
collections quand elle ne coupait pas leur tête. Le lyonnais Imbert-Colomès fut
du nombre des suspects auxquels la nation vola leurs cabinets. Je n'ai pas be-
soin de dire que ce second ouvrage de M. Bonnaffé a eu le même succès que celui
qu'avaient eu si justement ses' Collectionneurs de l'ancienne Rome, c'était une
nouvelle et grande page de l'histoire de Tart.
   Ce même succès était réservé à son Inventaire des-meubles de Catherine-de
Médias, de cette femme étrange que de Thou appelait la femme au luxe superbe,,-
fsemina superbi luxus, se complaisant au milieu des plus rares objets d'art et,
qui mourut insolvable et tellement délaissée de tous, « qu'on n'en fist non plus
d'estat que d'une chèvre morte. »                                               :. ..
   M. Bonnaffé, dont la main ne se lasse jamais, a donné ensuite. « Le surin-,
tendant Foucauet, un des plus célèbres curieux, le Catalogue de Brienne, —
^Inventaire de la duchesse de Valentinois, la Physiologie du curieux et- les
"causeries sur l'art et la curiosité, couronnées par l'Institut (Académie des
 Beaux-arts), livre digne delà haute approbation de ce grand corps savant.
   Aujourd'hui M. Edmond Bonnaffé est encore sur la brèche. Il reparaît avec
une nouvelle et grande Å“uvre, laquelle est aussi un bijou de typographie de la
maison Pion, les Recherches sur les collections des Richelieu. Qui ne connaît
ces hommes illustres dont l'un d'eux a été l'honneur de l'épiscopal lyonnais et
qui, toujours humble et modeste au milieu de toutes les grandeurs, a tenu à repo-
ser dans la petite église de la Charité, près des pauvres dont il avait été le bien-,
faiteur. Mais bien peu savent que le plus éminent des Richelieu, le plus grand
ministre de la France, a été aussi le plus illustre de ses curieux. Son temps, le
dix-septième siècle, comme le remarque si justement M. Bonnaffé, a inauguré
brillamment la nouvelle ère de la curiosité française, le maréchal de Créquy,
Mathieu Mole, Querver, le médecin de l'Orme, le président de Lauzon, Dumons-,
tier, Paul Péteau, sont les principaux curieuxde Paris. — En province, Yilleroy,
Gondi, Lesdiguières, d'Ornano, d'Epernon, les Cossé, les Gonzague remplissent
leur châteaux d'objets d'art et de simples particuliers recherchent à qui mieux
mieux, les reliques du passé. A Lyon surtout, comme on a pu le voir par un récent"
livre, les Chambres des merveilles, le goût de l'étude de l'antiquité et de ses
objets d'art va jusqu'à la passion. Les plus belles collections de tout genre, y sont
formées par de savants curieux. Du reste, comme l'a dit avec raison un célèbre:
critique, Lyon avançait sur Paris et sur les provinces ; la Renaissance des
lettres et des arts y avait commencé dès Charles VIII. L'armée des amateurs est
bien vivante et organisée aux débuts du dix-septième siècle, mais tous ont un
trait commun, dit aussi M. Bonnaffé; ils font de la curiosité privée. Richel'eu
a des vues plus neuves et plus fécondes, il ordonne par son testament « que ses
 collections puissent servir à sa famille et au public. » Il fonde ainsi des musées