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372 SAINT EUCHER II particulier, une opposition très marquée de goûts et de caractères. On ne peut nier que la physionomie d'EucherlI ne soit empreinte d'une grande austérité. En fuyant le commerce des hommes, il se cacha dans un désert, et, dans ce désert, il se choisit pour demeure un antre que son amour de la mortification transforma en un véritable tombeau. Quand on lui eut annoncé que l'église de Lyon l'avait élu pour évêque, sur le refus obstiné du saint ermite, il fallut, comme je l'ai raconté, démolir un mur, s'emparer de sa personne, l'assujettir avec des liens, et, tout le long du chemin, le garder à vue, afin de prévenir une évasion. Bien différente est la piété d'Eucher l'ancien. Dans son île riante d'où ses regards se perdaient sur l'immensité d'une mer azurée, il ne vaquait pas seulement à la contempla- tion ; il écrivait, il lisait les Pères, il étudiait ces divines harmonies du dogme chrétien qu'il devait plus tard inter- prêter si merveillement dans les savantes conférences dont Claudien Mamert, un des hommes les plus éminents de cette époque, nous a vanté l'éloquence et la profondeur. Toutes les fois que la nécessité ou la charité l'obligeaient à sortir 'du silence de ses méditations, le solitaire de Léro se montrait doux et plein d'affabilité. Séparé de Lérins par un bras de mer, il échangeait d'assez fréquentes lettres avec saint Honorât, supérieur du monastère avant d'être élevé sur le siège de saint Trophime. Saint Hilaire, ami d'Eucher et disciple d'Honorat, a cité de cette correspondance quel- ques traits de l'esprit le plus délicat. Enfin, mieux étudiés, les documents contemporains auraient empêché de transporter au foyer du premier Eu- cher les enfants de son homonyme, et, par là , de fondre en une seule deux familles parfaitement distinctes. Le second Eucher, comme nous l'apprennent les pièces.