Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
252             LES PEINTURES DÉCORATIVES

des instruments différents leur hymne à la nature. La lu-
mière de Rembrandt est tellement supra-naturelle qu'on a
été bien longtemps à découvrir que sa Ronde de nuit était
une Ronde de jour; il aime à parer ses portraits de perles
et de pierres précieuses sur lesquelles se projette ses feux
magiques au milieu d'une ombre épaisse et invraisemblable ;
on distingue de loin la forme précise des joyaux, de près
ce ne sont que d'audacieux empâtements de couleur. Van
Eyck a le même goût; il couvre ses personnages d'une vie,
si intense, de brillantes orfèvreries et de gemmes exécutées
avec une patience inouie, en trompe-l'Å“il, dirait-on ; on
n'est cependant frappé comme chez Rembrandt, que d'une
majestueuse unité. De part et d'autre, qu'il y ait profusion
de détails et luxe d'exécution ou bien comme une vue à
distance des objets, l'effet produit peut être égal sans être
semblable, lorsque l'idée et le sentiment de la nature ont
soutenu le maître.
   De même, et sans vouloir outrer les rapproche-
ments, l'exécution sommaire de Puvis de Chavannes n'est
qu'un bref langage qui simplifie l'expression, mais ne
la voile pas, parce qu'il est profondément naturel. C'est
encore un préjugé solidement assis qu'un idéaliste ne peut
être naturel. Quand donc voudra-t-on délaisser l'antithèse,
le choc [stérile des mots ? Pas d'idée sans forme, pas de
traduction vraiment supérieure de la forme sans idée. En
Angleterre, il s'est constitué une école dite préraphaélite,
vouée au culte de l'idée pure, tellement brûlante de cette
idée que la forme s'en est volatilisée. Dante Rossetti était
le prophète de cette école que Burn Jones soutient encore ;
où n'y a manqué ni de poésie, ni d'imagination, ni de su-
recxitation religieuse ; faute de forme on est tombé dans