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194                     MICHEL DUMAS




                               III


   Pendant les quatorze années que Dumas passa à Rome,
il visita tous ses environs dans tous les sens. Nous ne cite-
rons qu'une de ces curieuses excursions, celle que Dumas,
Pillard, Girodon et le brave Mehier, firent à pied, le sac au
dos, le cartable sous le bras dans la chaîne de montagnes
qui, de Tivoli à Albano, forme un quart d'amphithéâtre
dont Rome occupe le centre. Ils allaient par monts et par
vaux, un peu à l'aventure, faisant vingt-cinq milles par
jour (4), sans négliger, bien entendu, de prendre toutes
sortes de croquis au passage. Du haut de ces monts, ils
assistaient aux splendides effets d'un coucher de soleil dont
les derniers rayons s'éteignaient dans la brune. Et le len-
demain matin les retrouvait à saluer le même soleil radieux,
émergeant d'un nuage d'or.
   Sur ce parcours, que de sites, que de souvenirs ! Le pied
foule les obscurs vestiges des villas habitées par des séna-
teurs de l'ancienne Rome ou d'illustres poètes. Et pour
contraste, nos jeunes artistes, harassés, affamés et pourtant
toujours joyeux, arrivaient le soir dans de misérables vil-
lages, où ils pouvaient enfin manger... quand il y avait de
quoi. C'est l'inflexible Girodon qui conduisait la petite cara-
vane et faisait l'office d'officier-payeur, sans se laisser inti-
mider par les hôteliers rapaces et vociférateurs. Nos voya-
geurs firent halte à Tivoli, et poussant jusqu'à Subiaco, ils
virent les restes du fameux couvent de Saint-Benoît, et non


  (4) Le mille romain vaut 1481 mètres.