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  Cette chambre d'un ameublement si simple, elle a reçu
pourtant bien d'illustres visiteurs ; elle a vu arriver bien des
hommages de livres et de lettres aux sceaux armoriés. On
peut voir dans l'angle d'une glace les cartes de hauts person-
nages, de princes étrangers et d'écrivains distingués. "Voilà,
certes, le plus beau tribut d'admiration qui se puisse payer
au génie du poète, et il a droit de dire, lui comme le bon
Evandre:
               Aude, hospes, contemnere opes (1),
car un noble pèlerin a franchi le seuil de sa maison;
c'est mieux qu'Alcide. Un jour du mois de juillet, 1838, l'au-
teur des Martyrs, visitant quelques cités du Midi, poussait
une reconnaissance jusques à Cannes, afin d'étudier, pour les
décrire avec plus de fidélité dans ses Mémoires        d'Outre-
 Tombe, les lieux où Bonaparte débarqua aux Cent-Jours.
Pendant qu'ir fut à Nîmes, M. de Chateaubriand, gracieux
et courtois comme il est, s'empressa de conduire sa muse
vers celle de son humble frère en poésie, et s'achemina
rue de la Carreterie. Quand le secrétaire de l'illustre voya-
geur demanda Reboul, ce fut le boulanger lui-même qui
vint répondre et donner son heure, celle où commence un
peu de repos après le labeur de la journée. Quel ne fut
pas son étonnement, lorsqu'il vit sur la carte qui lui remit
M. Pilorge, le grand nom de Chateaubriand? Reboul aussi-
tôt se hâta de retenir le noble visiteur et de se confondre
en excuses!
  Il faut bien le dire, s'il vient souvent à M. Reboul

                              Une amitié choisie
              Pèlerine de l'art et de la poésie (2),
souvent aussi il lui arrive d'importuns visiteurs qui se jet-
tent à travers le travail du jour, la lecture et le far mente des
heures du soir.

  (1) Mn. VIII, 364.
  (2) Reboul, les Arènes de Nîmes.