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155 — Oh ! quant à cela, nos tribunaux n'ont que trop souvent à appliquer de sévères et tristes peines à des monomanes de tout âge, frénétiques en amour. Il existe des individus qui sont doués d'une plus grande impressio- nabilité, d'une plus forte et invincible volonté de possession. J'ai, moi qui vous parle, donné des soins à un pauvre jeune homme qui s'était brûlé la cervelle parce que son père refusait de le marier à une sienne et jolie cousine. — Une histoire ! une histoire ! et chacun des person- nages du petit salon se serra plus près du docteur. — Eh ! mon Dieu ! elle n'en vaut pas la peine ; et puis le dénouement est si absurde. — Justement ! dirent les dames, bon docteur, l'histoire! — Allons ! fît celui-ci, comme s'il se résignait....? Ecoutez donc ! Vous vous souvenez peut-être d'un voyage que j'ai fait, il y a quelques années, aux environs de Bordeaux. J'allais recueillir l'héritage d'un vieil oncle. Un soir, après avoir, tout le jour durant, entassé chiffres sur chiffres; causé terres, baux, loyers ; abîmé de fatigues; maudissant les tracasseries, les hommes de loi et leurs lenteurs, et ma foi ! presque les héritages, je m'étais couché et déjà profondément endormi. On m'éveille ; c'était la vieille gouvernante du défunt, qui, sans me laisser le temps de me lever, faisait entrer dans ma chambre un homme essoufflé ! Vite ! vite ! notre jeune maître vient de se tuer ; il s'est tiré un coup de pistolet dans la tête. En pareil cas j'ai pour habitude de ne jamais faire de questions; c'est temps perdu: aussi sans demander même à quoi un médecin pourrait être bon à un homme qui