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156 s est brûlé la cervelle, je me hâtais ; en un instant, j'étais prêt, muni de ma trousse, de mon appareil de voyage, et déjà en chemin, guidé par le domestique qui allait à grands pas, sans dire mot. De la maison de mon oncle, alors ma maison à moi, on voyait tout auprès un grand et beau château, un site agréable, de délicieuses eaux, un parc étendu et tenu avec goût; tout annonçait une riche et opulente maison; Ton m'avait dit que cette propriété appartenait à un vieux colonel; il ne lui restait qu'un bras, et quoique jeune alors, on l'avait mis à la retraite dès les premières guerres de l'Empire. C'était là qu'on avait besoin de moi. On me fait monter un escalier, on me pousse dans une chambre à coucher, et là , prés d'un lit, je vois une tête blanche, vénérable, belle, penchée sur une tête sanglante, noire, méconnaissable autrement que par la forme, car pour les traits du visage .... plus rien ! Je m'approche, et il se fait un profond silence Contre son habitude le cœur me battait fort ; j'entendais les pulsations de mes artères; en vérité j'étais profondé- ment ému; mais aussi c'est que tout cela était bien im- prévu ; et puis, ce vieux père qui me regardait sans pouvoir parler; et puis encore une jeune et bien belle femme à genoux près du lit, étreignant avec désespoir le bras du malheureux étendu là . Oh ! je vivrais mille ans que j'aurais toujours là , présente devant les yeux, cette figure si puissante, si admirablement sublime d'expression ! la malheureuse!... elle n'avait pas encore pu pleurer ! Je devinais tout un drame entre ces trois personnes... Pauvre jeune homme ! pauvre jeune femme ! pauvre !