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124                    AUGUSTE BRIZEUX

deux charmantes sœurs à qui on l'avait envoyé, parce
qu'elles avaient un chagrin ce jour-là, et il y était écrit pour
épigraphe ces deux vers :
      Lire des vers touchants, les lire d'un cœur pur,
      C'est prier, c'est pleurer, et le mal est moins dur.
   Les deux vers étaient de Sainte-Beuve lui-même. La
gracieuse et charmante idylle de Marie nous reporte à
Mosclius, àBion, à Synésius, àThéocrite enfin. « Les poètes
anglais du foyer, Cooper, Wordworth, n'ont jamais rendu
plus délicieusement les joies d'un-intérieur pur, la félicité
domestique, le bonheur des champs. Il n'est pas chez les
Lakistes un sonnet pastoral plus gracieux et plus limpide. »
Enfin, mérite suprême, Marie est une œuvre sans précé-
dent dans les lettres françaises. Elle nous apparaît comme
une fleur exquise qu'a produite spontanément la terre de
Bretagne. Son doux poète, énergique à ses heures, chante
si bien
     Le noir Elle d'abord, ou le Scorf à ta droite
     Roulant ses claires eaux dans sa vallée étroite,
     Et, tel qu'un doux parfum, le chant de mille oiseaux
     S'élevant du vallon avec le bruit des eaux ;
   . La brise dans les joncs qui siffle et les caresse ;
     Puis l'appel matinal de la première messe,
     Répété tour à tour comme un salut chrétien,
     Du clocher de Cléguer à celui de Kérien...
     Adieu, Daniel! adieu, le bourg, l'église blanche!
     Adieu, ton beau pays ! Après vêpres, dimanche,
     Tes amis le verront pour la dernière fois,
     Et tu cacheras mal tes larmes sous tes doigts;
     Car pour nous, vieux Bretons, rien ne vaut la patrie,
     Et notre ciel brumeux et la lande fleurie !...