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Iû8 LA CHASSE A L ' A B O N K È Il est extrêmement rare qu'ils viennent tout seuls. De là , est née la chasse à l'abonné, chasse sans trêve et sans merci, où toutes les ruses semblent permises, tous les traque- nards autorisés. Ce serait grand dommage, — en vérité, — de laisser dans l'ombre des exploits cynégétiques qui valent assuré- ment la peine d'être mis en lumière, ne serait-ce que pour s'en divertir un peu. II Je ne sais plus où j'ai, lu cette recette qui pourrait aussi bien s'appeler un apologue. Un paysan avait trouvé le moyen de faire marcher son âne en fixant à deux doigts de son nez une botte de carottes que le baudet poursuivait sans cesse et n'atteignait jamais. Quand la pauvre bête, fatiguée, découragée, secouait les oreilles et était sur le point de s'arrêter, le paysan lui per- mettait de brouter un peu de fane... C'était bien appétis- sant pour un estomac affamé !... et, — tant bien que mal, l'âne reprenait sa course ingrate à la poursuite de son insaisissable carotte... Je crois me souvenir que, dans l'apologue, l'âne, c'était nous; et la carotte, le bonheur que nous poursuivons sans jamais l'atteindre. Abstraction faite de ce que cette comparaison, — d'allure un peu trop rustique, — peut avoir de blessant, elle traduit assez fidèlement la situation de l'abonné vis-à -vis de certains journaux trop enclins à faire des promesses qu'ils ne peuvent réaliser. Dans l'espèce, ces promesses s'appellent « des primes ».