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362 NICOLAS BERGASSE. accoucher. N'oublions pas de citer, parmi les visiteurs d'oc- casion de ce salon politique, un jeune avocat de l'Artois, élevé à l'université de Paris par la générosité d'un prélat, el qui ne se doutait pas alors qu'il dût ajouter à la liste des tyrans contre qui s'élèvera éternellement le cri du sang in- nocent, le nom profondément ignoré de Maximilien Robes- pierre. Époque vraiment terrible et grandiose, faite pour consterner et pour séduire, dont il faut haïr les crimes et regretter les espérances ! De tous ces noms, pas un qui ne fût promis a la célébrité ; de toutes ces tôles, pas une qui ne fût vouée à la proscription ou à l'échafaud ! Ce que nous pouvons savoir des conversations échangées entre ces personnages jette un trait de lumière sur les an- nées qui ont préparé 89. Il y avait là le parti de la monarchie constitutionnelle, le parti de la république, le parti du par- lement. Cette dernière opposition, qui occupait seule la scène en ce moment, élail aussi la plus irréconciliable de sentiments el la plus osée en propos. La grand'chambre et Versailles en étaient venus à ne plus procéder, l'une que par refus d'enregistrement, l'autre que par lits de justice, et d'Esprémenil s'oubliait jusqu'à dire à la table de Kornmann qu'il fallait débourbonnailler la France. Le chef futur des Girondins* qui a écrit ses mémoires dans la prison de l'Ab- baye, entre la journée du 31 mai et l'immolation du 31 oc- tobre 1793, s'est vanté d'avoir osé prononcer dès ce moment le mot de république. Ciavière seul, en digne citoyen de Genève, lui faisait écho. Quant à Bergasse, il exposait, avec l'éloquence apprêtée qui lui était propre, la thèse de Mon- tesquieu sur la monarchie à Irois pouvoirs distincts et limités les uns par les antres. Le roi inviolable, des ministres res- ponsables, une chambre des communes à l'élection et une chambre des pairs au choix du roi; l'affranchissement des municipalités el des provinces enlacées déjà dans les liens