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NICOLAS BERGASSE. 363 d'une centralisation qui s'essayait ; la dignité du citoyen re- mise à sa propre garde par la liberté de la presse ; de fortes lois pour garantir l'Etat, les moeurs, la religion, l'honneur des personnes : tel était dès lors le noble idéal de celte école constitutionnelle à laquelle Bergasse s'est honoré de rester fidèle à travers les épreuves d'une longue vie partagée pres- que également entre le siècle de. Voltaire et le siècle de Napoléon. J'ai parlé tout à l'heure de Mirabeau ; ses relations avec Bergasse avaient commencé dans le comité des Noirs, fondé par Brissot sur le modèle de celui qui préparait à Londres la grande et chrétienne mesure de l'abolition de l'esclavage. Ce comité avait ponr organe un journal intitulé : Analyse des papiers anglais, le premier, croyons-nous, qui ait initié notre public français aux discussions et aux libertés qui ré- gnent de l'autre côté du détroit. Chargé de ce travail, Mira- beau avait obtenu, non sans peine, d'ajouter aux traductions anglaises qu'il ne faisait pas lui-même le compte-rendu sommaire des travaux du comité de Paris. L'Analyse des papiers anglais paraissait quand elle pouvait, c'est-à -dire quand il y avait de l'argent à la caisse et que le lieutenant de police n'y voyait aucun mal. Ainsi commençait avant la Ré- volution cette puissance redoutable et nécessaire du journa- lisme, ce quatrième pouvoir de l'Etat qui devait avoir les trois . autres tour à tour pour victimes, pour protégés et pour en- nemis. Malheureusement Bergasse et Mirabeau n'étaient pas faits pour concourir longtemps ensemble à la même Å“uvre. Moins connu pour ses travaux économiques que pour le scandale de ses aventures, le fils de l'Ami des hommes, qui entendait être accepté en entier avec ses vices et sa détestable renommée, ne pouvait plaire à l'austère avocat au parlement. Mirabeau devina d'instinct la répulsion qu'il inspirait à son col- lègue. Hautains et dominateurs tous les deux, ils en vinrent Ã