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SUR RICHARD DE LAPRADE. 33 Quelques mois plus tard, à la chute de la Restauration, notre collègue refuse le serment au pouvoir qui surgit. Se respectant trop pour voyager d'un parti a l'autre et se ranger du côté du plus fort, il donne s'a démission de pro- fesseur à l'École de médecine, de médecin du Collège Royal. Il a fallu du courage, on ne saurait le nier, pour renoncer h des places nécessaires h sa modeste aisance, qui l'aidaient a élever sa famille, étaient la juste récompense de ses travaux et de ses services. Mais, ayant vécu dans l'indifférence de la fortune, que lui importe la voix de ses intérêts ? il suit la ligne droite ; sa conduite est sans va- riations . Pouvions-nous ne pas rendre hommage a cette probité inflexible, à ce désintéressement exceptionnel d'un homme perdu dans la foule, lorsque nous savions que, durant les jours, meilleurs pour lui, il avait négligé les occasions favorables de tirer parti des événements et de la situation, de profiter du crédit dont il jouissait auprès des grands ? Au milieu de cette fièvre de luxe, d'ambition, de besoins matériels qui dévore notre société, que dira le monde, d'un sage qui a pensé devoir faire un autre emploi de son intel- ligence et de son temps que de couiir après la richesse?.... Pour nous qui l'avons suivi dans la retraite, nous le repré- senterons tel qu'il nous a paru*. Simple, inébranlable dans ses convictions, ayant plié sous le vent de la fortune, sans être abattu par elle, content du peu qu'il avait et surtout de son indépendance, caressant le bonheur, si peu envié, de vivre dans la médiocrité; il avait compris la valeur de cette sen- tence du philosophe ancien :« celui qui sans trouver sa posi- tion délicieuse, y rencontre le calme et la paix, doit se croire mieux traité par le sort que la condition humaine ne permet- tait de l'espérer. » Observateur attentif, mais non impassible, il suivait le 3