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104 LES VILLEROY.
sance que les Lyonnais multipliaient a son égard, j'ai la
preuve qu'il chercha souvent à retenir leur zèle obséquieux.
Il brûla peut-être moins d'encens qu'on n'en brûla pour lui.
Mais l'histoire ne peut oublier les funestes conseils dont
Louis XV fut redevable à son gouverneur ; elle a enregistré
avec indignation les étranges doctrines que le maréchal
professait sur les droits des rois vis-a-vis des peuples, et
dont le jeune monarque fit comme une première applica-
tion sur celui qui les lui avait trop bien inculquées. Si de
la nous arrivons a l'examen de sa vie privée, nous devrons
constater qu'elle est loin de racheter les fautes de l'homme
politique. Enfin il n'y a pas jusqu'Ã l'administration de sa
fortune où il ne se soit trouvé en défaut ; possesseur de
biens immenses accrus par des héritages inespérés, il réus-
sit à se ruiner par un luxe qui dépassait toute proportion,
et qu'il n'aurait pu soutenir sans le secours de son fils aîné.
Je n'ai rien dit encore de ces héritages ; ils sont trop
importants néanmoins pour que je puisse les passer sous
silence. On se rappelle que le premier maréchal de Villeroy
avait épousé une Créqui, petite-fille de Lesdiguières. La
postérité masculine du maréchal de Créqui, gendre du
grand connétable, s'étant éteinte par la fin presque simul-
tanée de trois branches, la plus grande partie des biens de
cette puissante maison était, a l'avènement de Louis XV, la
propriété de la duchesse douairière de Lesdiguières, née
de Gondy (1) dont le plus proche héritier était le maréchal
(1) La ligne masculine de Créqui-Lesdiguières s'était éteinte dès 1711,
mais il y avait encore deux duchesses douairières de ce nom, l'une qui est
celle dont nous venons de parler, et l'autre, née Rochechouart, veuve du
dernier duc qui s'était fait désavantageusement connaître à Lyon sous le
nom de comte de Canaples et que Saint-Simon a justement ridiculisé.
Celle-ci, beaucoup moins riche, ne mourut qu'en 1740, et laissa encore
quelques biens aux Villeroy. V. Samt-Simon, t. IX. p. 418, et le due de
Luynes, Mémoires, t. III, p. 165.