page suivante »
392 DE L'UNITÉ DES ARTS. dent l'art en un plus ou moins grand nombre de branches dis- tinctes, et lui font subir des modifications si variées selon les lieux, selon les individus. En d'autres termes, l'art en tant qu'astreint à l'emploi des formes sensibles pour manifester l'i- déal, dérive dans l'humanité du sentiment de la nature. La nature est différemment sentie dans les climats et les âges différents, par les différentes races et les différentes personnes. Ce sont des modifications dans la manière de sentir la nature, qui produisent toutes les modifications , toutes les révolutions essentielles dans l'histoire des arts. L'histoire de l'art est donc l'histoire du sentiment de la nature. A l'origine des sociétés comme dans l'enfance des hommes, l'esprit humain sent d'abord la nature dans une synthèse con- fuse, il ne connaît rien que le concret, il débute par une notion vague et confuse de l'ensemble des choses extérieures. L'homme sentit d'abord l'univers en bloc, il fut impressionné d'abord, sinon par son unité, du moins par sa totalité. Le sentiment qui, en l'absence de lumières surnaturelles, devait, chez les peuples naissants, engendrer le panthéisme oriental, fut le sentiment primitif de la nature. L'art primitif fut l'expression de ce sen- timent. Il réunit d'abord, dans sa monstrueuse unité, toutes les formes qui devaient, plus tard , exister par elles-mêmes, et constituer ainsi les arts divers. Image de la nature qui supporte et renferme dans son sein les règnes variés des êtres, édifice immense qui se découpe en mille formes, et se nuance de mille couleurs, qui s'emplit des bruits sans nombre émanés du mouvement et de la vie, l'archi- tecture a été cet art primitif et générateur , au dedans duquel tous les autres sont éclos, confondus d'abord avec leur enve- loppe germinatrice et détachés lentement dans l'ordre même, où les existences végétales, animales, intellectuelles, se sont dé- tachées de la terre. Ce que l'homme a vu, dès l'abord, dans la nature, c'est la forme de l'idée de Dieu. Aux yeux des peuples enfants, cette forme était Dieu lui-même. Aussi, en élevant la plus ancienne de ses constructions, l'édifice religieux, le temple, c'est la première idole, l'idole monstrueuse du panthéisme, que