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220                  DltOUET DE MAVJPERTUY.
lui préféra une fortune riante et prompte , qui se présentait à
lui, et qui ne lui promettait, à l'âge de vingt-deux ans, que les
jours les plus beaux et les plus brillants du monde.
   11 avait un oncle fermier-général, qui lui donna un emploi
considérable dans une des provinces du royaume, où il trouva
tout ce qui peut séduire un jeune homme. L'amour des livres
l'y suivit.- il leur fut toujours fidèle ; ainsi, il se partageait en-
tre les plaisirs et la lecture. A l'égard de son emploi, il s'en
reposait sur des commis fidèles et laborieux.
   Il composa même, au milieu de ses divertissements, une
pièce en prose, que l'auteur du Mercure ne trouva pas indi-
gne de tenir une place honorable dans son journal. Elle avait
pour titre : l'Amour peintre, et n'avait rien que ce titre de com-
mun avec le Sicilien et Molière.
   Une vie de plaisir ne conduisit jamais à une haute fortune.
Aussi Maupertuy, bien loin de s'enrichir dans les différents em-
plois par lesquels il avait passé successivement, dans l'espace
de quinze à seize ans , y dissipa tout son patrimoine , qui était
assez considérable.
   Faisant alors de sérieuses réflexions sur l'état où l'avait ré-
duit sa mauvaise conduite et l'amour désordonné dés plaisirs,
et un rayon de la grâce venant tout d'un coup dissiper les ténè-
bres que le monde et les esprits impurs qui le gouvernèrent,
avaient jeté dans son âme, docile à l'inspiration, il renonça,
sans différer d'un moment, au monde, aux emplois, à la for-
tune et à toutes les fausses divinités auxquelles il avait impru-
demment sacrifié les premières années de sa vie, et les plus
belles.
   S'étant mis sous la conduite éclairée d'un saint ecclésiasti-
que, il commença une nouvelle vie, au milieu d'un assez grande
ville , la patrie de ses ancêtres ; il s'établit une solitude ; il
rompit tout commerce avec parents, amis, connaissances agréa-
bles, et, en attendant que, par le conseil de son sage directeur,
il pût prendre une nouvelle figure extérieure, il fit l'essai, pen-
dant deux ans, de la vie chrétienne et réglée qu'il projetais de
mener le reste de ses jours.