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42 M. A.-C.-H. TR1M0LET. que la peinture est chose si commune qu'il serait de mauvais ton de se donner la peine de la regarder. Alors c'était presque de la nouveauté, et il était de l'extrême bon genre et de mode d'aller visiter les ateliers du peu de peintres qui produisaient quelque chose. Aussi, pendant plusieurs mois, ce fut foule chez moi, et les compliments banaux pleuvaient sur mon pauvre individu tout étonné d'avoir su faire de la prose !... M. Revoil, mon maître à l'Ecole des Beaux-Arts, et quelques connaisseurs distingués m'engagèrent à envoyer mon tableau au salon de Paris ; je le fis et je l'accompagnai. Là m'attendaient de nouveaux succès. Vogue populaire, éloges des journaux (alors gratuits et sans camaraderie), récompense du gouvernement, rien ne me manqua. C'était à donner de l'amour-propre au plus modeste ! Ma timidité ou plutôt ma bêtise me sauva ; vrai, je ne songeai pas seulement à en avoir. M. le comte de Forbin, directeur des Musées royaux, m'offrit de la part du duc de Berry dix ou douze mille francs de mon tableau. Je ne me rappelle plus au juste ; mais il est certain que ce n'était pas moins de 10,000 fr. Comme je l'avais entrepris pour MM. Brun et Eynard, et que ce dernier avait suivi son image à Paris, j'allai le trouver pour savoir s'il me permettait d'accepter ce bénéfice et cet honneur ; mais, hélas ! plus ma pro- duction était louée et acquérait de valeur, et plus il y tenait ! Il ne voulut pas absolument s'en dessaisir et me promis en dédom- magement 1,200 fr. comptant; 6,000 fr. après sa mort, et de plus, de donner à son retour dans ses foyers le tableau au Musée de la ville de Lyon. Je trouvai cela magnifique et fus extrême- ment flatté d'être le premier de mes camarades de Saint-Pierre à voir mes ouvrages au Musée. S. A. R. ne s'en tint pas là , et me fit l'insigne honneur de me proposer de faire son portrait, celui de la duchesse et de la petite Mademoiselle, groupés ensemble dans un intérieur. — Ma mal- heureuse méfiance en mes moyens, mon manque de hardiesse, ma timidité (oui'amour-propre si l'on veut) m'exagéraient les diffi- cultés, me pétrifiaient à la seule pensée d'être en présence du prince et de la princesse ; je me voyais d'avance tremblant et stupido