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SUR L'ABBÉ BONNEVIE. 313 gile dans les contrées les plus éloignées, l'amour pour l'Église, la charité universelle, le désintéressement héroïque de l'éminent personnage dont la perte allait devenir un deuil pour toute la chrétienneté, furent retracés par l'orateur avec un sentiment des convenances, une noblesse de langage, une digne simplicité qui ne fit qu'augmenter, dans son auditoire, le désir qu'on avait de l'entendre plus souvent. Depuis dix ans au moins, la tribune sainte avait été muette, nos temples fermés ; nos prêtres proscrits ou morts sous le glaive de la Terreur , avaient laissé les fidèles chrétiens privés du pain de la parole. Chacun avait besoin de retremper sa foi, et de raviver ses espérances par le spectacle pompeux des so- lennités religieuses. Un prédicateur était devenu une rareté, il devint tout à coup un besoin. Aussi l'abbé Bonnevie se multi- plia-t-il ; presque toutes nos églises, rendues enfin au pieux em- pressement des fidèles, devinrent successivement le théâtre du zèle évangélique du nouvel apôtre. On l'y appelait de toutes parts; il ne se lassait pas de parler, on ne se lassait pas de l'entendre ; il était bien, dans ces premières années de la restau- ration du culte, un des prêtres les plus occupés de la cité. 11 n'improvisait pas, et le travail de la préparation était pour lui plus pénible que le travail de la chaire. Aussi les plus vastes églises étaient-elles toujours trop petites pour contenir la foule qui s'y portait, afin de jouir du charme de sa parole. Cependant une nouvelle carrière semble s'ouvrir pour l'abbé Bonnevie. En 1810, le jour de la distribution des prix aux élèves du Lycée impérial de Lyon, les autorités civiles et mili- taires , les familles de la nombreuse jeunesse qui venait d'être couronnée, étant réunies dans la grande salle de la Bibliothè- que , les derniers applaudissements se faisant encore entendre, M. Nompère de Champagny, recteur de l'Académie , réclame le silence, et, d'une voix solennelle, annonce, à l'immense assem- blée, que l'abbé Bonnevie, chanoine de la Primatiale, est nommé, par le grand-maître de l'Université de France, Proviseur du Lycée impérial de Lyon. Aussitôt les voûtes de la salle retentissent d'applaudissements