Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
406                      DU NOM DES ACTEURS.

parisiens un rang fort honorable, s'est baptisé du nom de
 la capitale de son canton; et souvent le mot de Lauzanne
fut proclamé à la fin d'une pièce, au milieu des applaudisse-
ments du public prodigués à l'auteur qui fait ainsi rejaillir
sur sa patrie une partie de la gloire théâtrale qu'il s'est
acquise (1).
   Si grande pourtant que soit la latitude dont jouissent les
littérateurs, de prendre les noms qui leur plaisent, il y aurait,
je crois, de graves inconvénients de leur part à en choisir qui
fussent déjà avantageusement connus dans la République des
lettres ; en ce cas, il faudrait absolument que le mérite du
moderne éclipsât et fit totalement oublier celui de l'ancien ;
quel auteur de nos jours ne serait écrasé sous les noms de
Molière, Corneille ou Voltaire ! ! cependant certains articles
de journaux, signés Grimm, ont motivé ces observations ; si
le baron de Grimm fut connu dans le siècle dernier par une
fatuité fort originale dont Rousseau nous raconte quelques
exemples dans ses Confessions ; il fut aussi un écrivain plein
de goût, d'érudition et d'esprit ; correspondant de plusieurs
souverains du nord qu'il tenait au courant des ouvrages nou-
veaux qui paraissaient en France; il sut toujours lesjuger avec
une grande finesse ; ses louanges étaient délicates, ses cri-
tiques fort spirituelles; et peut-être est-il plus facile à son
homonyme d'en porter le nom que d'en soutenir la réputation
el d'en égaler le mérite. J'aimerais mieux que les auteurs
prissent pour parrain l'ouvrage par lequel ils se sont fait le
plus avantageusement connaître, comme un général d'armée

    (1) M. le comte Noë, pair de France, a un fils qui s'est fait dans les
charges et la caricature un nom qui aurait pu compromettre la gravité de
celui de M. son père ; en sorte qu'il s'est baptisé Cham, nom de l'un des
fils de l'antique planleur de la vigne, laissant à ses frères, s'il en a, ceux
de Sem et de Japhel, dans le cas toutefois où ils se distingueraient ainsi
que lui par des talents peu clignes de la pairie paternelle.