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 126                   NAPOLEON A LYON.

  Quelques heures après notre dernière entrevue avec le gé-
néral, Napoléon s'éloigna ne Lyon, en adressant de touchants
adieux à ses habitants dans la célèbre proclamation qui se ter-
minait par ces mots : « Lyonnais, je vous aime. »



    Avant la fin de la journée Camille partit un peu contrarié de
 demeurer seul chargé de la responsabilité qu'il avait acceptée.
 Je l'accompagnai jusqu'à l'entrée de la grande route de Grenoble,
 où je le laissai fort embarrassé du fameux canon de plume qu'il
 avait reçu de Drouot •. la crainte de le perdre le tint dans une
 grande perplexité pendant tout le cours d'un voyage qui, de-
 puis Grenoble, devint très-pénible et ne fut pas exempt de
 certains dangers, surtout à mesure que notre messager appro-
 chait de sa destination. Seul, et la plupart du temps à pied,
 il avait à traverser des pays affreux, au milieu d'habitants qui
 ne différaient guère du pays. Alors Camille avait toujours à
la main le précieux cure-dents qui le tenait plus en souci que
sa propre personne. Bref, après bien des peines de corps et
d'esprit, il arriva sain et sauf à Toulon, avec la satisfaction
d'avoir réussi à préserver de toute mauvaise rencontre le bien-
heureux tuyau de plume qui l'avait tant préoccupé.
    Ce n'était pas tout ; arrivé à Toulon il fallait pénétrer au-
près du Maréchal, ce qui fut presque aussi difficile que de tra-
verser les Alpes. Camille se présenta plusieurs fois à son loge-
ment, plusieurs fois il fut éconduit. Ces mots : de la part de
l'Empereur, qui faisaient ordinairement ouvrir toutes les portes,
tomber toutes les barrières, étaient vainement prononcés en
cette occasion. Soit que Masséna ne crut pas au succès de la
hardie entreprise de Napoléon, soit qu'il se méfiât d'une popu-
lation exaltée parmi laquelle il n'était pas impossible qu'il se
trouvât un fanatique capable d'exécuter quelque atroce pensée
contre un lieutenant de l'empereur, il refusait de recevoir l'en-
voyé lyonnais et se bornait à lui faire demander par un de
ses officiers les dépêches dont il se disait porteur. Mais les