page suivante »
38 DE LA DOULEUR DANS LE TEMPS. aurait un affaissement effroyable de la nature humaine. Rendez (out-à -coup un peu de facilité à l'homme brut, un orgueil démesuré éclate, la stupidité fait sortir de son sein tout ce qui existe d'insensé, de ridicule et de dur. Prenez seulement le peuple au soir d'un jour de fête : supposez que le lendemain ne soit pas là près! Il est des âmes que le travail ne peut quitter un seul ins- tant ; sinon elles retomberaient au fond de l'étal sauvage. Quand vous examinerez de près la vie, vous reconnaîtrez combien d'hommes ne doivent leur éducation qu'à la misère ! Beaucoup d'enfants qu'une tendre sollicitude des pères en a pour quelques jours retirés, redeviennent incessamment mau- vais et les derniers des hommes. Il est vrai que leurs vices les reconduisent alors si bas que la misère reprend bientôt leur éducation par le pied. J'ai vu les hommes incultes rire et manger leur faible salaire aussitôt qu'ils le tenaient; puis perdre leur clientèle, rester sans ouvrage et pleurer... et je les ai vu sans cesse recommencer ! Ah ! ne croyez pas que l'homme soit tout fait ! Un peu de bien-être le perd, un travail assidu l'élève. Le plus grand nombre a besoin d'être à tout instant rappelé par la forte question de la vie... j'en ai bien examiné plusieurs : ce sont des commencements d'hommes. Même pour les choses de la vie, il faut que les hommes arrivent par une route saturée de travail à une existence où il entre quelques loisirs. Encore, en reste-t-il peu qui puissent soutenir cette dangereuse position. Le luxe fait vite écrouler ce qu'on a mis plusieurs générations à édifier dans une race d'âmes. Il faut plus de vertus pour conserver une fortune que pour la recueillir ; la force qui l'a constituée ne suffit pas pour la porter. Les familles sont des dynasties de vertus; le jour où ce sceptre leur échappe tout redescend. J'ai vu qu'il fallait que les rênes de la peine tinssent cons-