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    Voici un changement de décoration. La rampe est baissée,
le lustre est couvert, la scène n'est éclairée que par une l u -
mière t e r n e , qui jaunit les acteurs ; pauvres diables déjà
assez décolorés par la faim, et qui se pressent déguenillés
autour de saint François de Sales. — C'est une composition
d e Robert Fleuri. Ce sont de ces Å“uvres qu'on estime et
qu'on aime peu. Il y a du talent; il y manque ce je ne sais
quoi qui donne de la vie aux choses.
    Je passe sous silence quelques autres productions insigni-
 fiantes ou mauvaises. A quoi bon! l'amour p r o p r e est une
surdité morale que ne peut percer la voix du critique. Pour-
quoi troublerais-je la joie de ceux qui se croient appelés ? Je
laisse donc en paix les portraits de M. J a c o m i n , les Troupiers
 et les Villageoises de M. Genod, la Danaé de M. D u p r é ,
l'Enosh de M. F r e n e t , et tutti quanti.
    Mes confrères ont prétendu que lorsqu'on ne savait pas
 dessiner, on s"e jetait dans le paysage. — Le p a y s a g e , à ce
 compte , serait la chambre des pairs de la peinture. — Pau-
 vres peintres de paysage, comme on vous traite! Pour ma
 p a r t , je ne vous fais pas cet outrage. — Bien des peintres en
 histoire ne seraient que des croûtes en paysages, et j'estime
 le talent de ceux-ci à l'égal des autres. J'aime autant Poussin
 et Ruysdael que Raphaël et Rubens. — L e mystère de la vie
 est partout difficile à rendre. — Ceux-là sont grands qui
 parviennent à l'initiation de ce grand secret.
     C'est pourquoi j'ai une prédilection marquée pour les ou-
  vrages de Guindrand. — Les pays qu'il déroule, je les ai vus
  quelque p a r t ; peut-être dans mes r ê v e s ; car il rencontre
  merveilleusement le site tranquille et agreste où, en mes jours
  de lassitude, je me plais à bâtir une retraite. Ses paysages
  n'ont rien de commun avec ces Å“uvres de l'imagination, es-
  pèce de jardins anglais, dans lesquels le caprice de l'homme
  se montre partout comme un frontispice. Ce qu'il arrange
  ressemble si fort à ce qui e s t , qu'on se prend à chercher
  dans ses souvenirs si l'on n'a point passé par là. Seulement