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BIBLIOGRAPHIE 017 Je n'aime guère La Mort d'Olivier Bécaille. L'autour ne me semble point arriver à produire l'effet qu'il recherchait : il a trop délayé son sujet. Edgard Poé aurait condensé tout cela en trois ou quatre pages, et nous eût fait frissonner. Les Coquillages de Monsieur Chaire sont une plaisante historiette sur un vieux thème. Nous ont-ils fait lire, depuis les fabliaux du moyen âge, ces pauvres maris? Il est à croire que le type de Sganarelle est appelé à fleurir éternellement dans notre littérature. M. Zola en a tiré un excellent parti et nous a donné un charmant conte, un peu gaulois, ce qui ne gâte rien, et tout plein, en même temps, de fraîcheur et de grâce. •Sacques Damour est un déporté qui rentre à Paris au moment de l'amnistie; sa femme est remariée, sa fille a mal tourné. Il retrouve son mauvais génie, un nommé Berru, celui qui l'a entraîné ainsi que son û\s dans les rangs des fédérés, et qui a su disparaître à temps pour n'être même pas inquiété, tandis que Damour était condamné à la déportation et que son fils Eugène mourait sur une barri- cade. Berru le pousse, l'excite; il le conduit à sa femme, au nouvel époux de celle-ci, il faut que Damour fasse du scandale. Mais le pauvre Jacques s'attendrit, il renonce à toutes ses prétentions, ils trinquent même ensemble, puis il s'en va. Guidé par Berru, il pénètre chez sa fille, demi-mondaine, richement entretenue : c'est là qu'il a le meilleur accueil, et qu'il trouve un refuge. Louise établit son père concierge dans une propriété qu'elle possède près de Paris, et il y coulera tranquillement ses vieux jours. Jacques Damour, dont j'ai indiqué sommaire- ment le sujet, mais que je n'ai pas prétendu analyser, est, à mon sens, un véritable petit chef-d'œuvre et mérite de prendre place à côté des meilleures nouvelles que nous ayons en notre langue. J'en dirai autant de Madame Neiyeon que je regarde comme laperle du recueil. Ne voulant point déflorer ces délicieuses pages en tentant d'en donner une idée qui ne saurait être que très imparfaite, je me contente de renvoyer le lecteur au volume. Je crois qu'il fera comme moi, et qu'après avoir lu, il relira. CH. LAVENIU. REVUE DU MONDE LATIN, recueil mensuel, économique, littéraire et social. Directeur, CH. DE TOURTOULON. — Bureaux, 6, rue Mézières, Paris. — Abon- nements, 36 fr. par an. Souvent déjà il s'est rencontré des hommes au cœur élevé et généreux qui, en méditant sur l'histoire des nations dont toutes les pages sont teintes de sang, se sont demandé si les peuples, au lieu de se regarder toujours comme issus de races différentes et de s'entr'égorger, ne devraient pas se souvenir qu'ils sont tous fils d'un même Dieubon et de paix, et vivre en frères, dans une union parfaite. Mais leur voix s'est perdue toujours dans le tumulte et dans les convulsions des événe- ments. Les préjugés, les préventions et de cruels instincts ont sans cesse prévalu. Aujourd'hui, plus que jamais, ce qu'on a appelé les races s'observent, le glaive à la main, et ces races n'attendent que l'heure propice pour imposer leur joug les unes aux autres et s'anéantir peut-être. En présence de ces horribles éventualités et dans l'impuissance de les prévenir et pour amoindrir leurs funestes consé- quences, d'éminents écrivains de la race latine se sont réunis, groupés dans la généreuse pensée de faire connaître les peuples et les pays latins dans leurpresent DÉCEMBRE 1883. — T. VI. -40