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530                   LA R E V U E LYONNAISE

 des hontes de l'heure présente, qui tremblez en sentant le sol va-
 ciller sous vos pas, qui craignez de voir bientôt la terre rentrer,
 comme au moment du chaos, sous les eaux pesantes, qui demandez
en soupirant ce qui rallumera les phares éteints parla tempête, qui
rendra aux forts l'amour, aux faibles le respect et la confiance,
qui hésitez même, malgré les divines promesses, à croire auxdes-
tinées immortelles de l'Église, ouvrez ce livre; sans que son auteur
y ait songé, il a été écrit pour vous ; il ne vous bercera pas de vains
 rêves, il ne vous promettra point de vulgaires revanches comme
 une grossière indemnité de vos souffrances présentes, il ne tentera
pas même d'adbucir votre affliction,puisqu'il est triste,lui aussi;
 mais il vous consolera, il vous fortifiera, car de sa tristesse même
jaillit un invariable espoir, une foi iudomptée dans le Christianisme,
c'est-à-dire dans le triomphe suprême de la vérité, du bien, de la
justice. Tout passe, celui-là reste; quand tout est écrasé, celui-là
demeure debout. Son histoire ne nous apprend-elle pas comment il
est né et comment il a vaincu? Un petit troupeau d'hommes simples
a pénétré, malgré les tortures, les proconsuls, les empereurs, '
 dans le monde romain qui se riait de son arme unique, la parole.
Quelques années à peine se sont écoulées, et voici qu'à la voix de ces
étrangers annonçant un royaume nouveau, le paganisme vermoulu
craque de toutes parts. Vainement il appelle à lui toute sa puissance :
ces pêcheurs d'hommes ne craignent ni la griffe des bêtes féroces,
ni le glaive, ni la flamme ; ils sont eux-mêmes le glaive et la flamme
de Dieu. Ce glaive abat le tronc desséché du vieux Jupiter; cette
flamme consume les branches flétries de l'empire, et une moisson
de fleurs odoriférantes pousse soudain sur l'arbre régénéré.
   Jupiter n'était pas mort, il n'était qu'endormi : depuis ce jour,
il a plus d'une fois essayé de réchauffer sa sève glacée et d'étouffer
le luxe de cette végétation nouvelle sous le poids de ses rameaux
empoisonnés. Stériles efforts, lutte impuissante! De quelque artifice
qu'il ait usé, quelque forme qu'il ait revêtue, quels que soient les
rejetons qu'il ait poussés, quelques blessures qu'il ait faites à l'arbre
majestueux, celui-ci a cicatrisé ses plaies, plongé plus profondé-
ment ses racines dans le sol, purifié de tout poison les canaux qui
alimentent ses branches, et refermé sa vigoureuse écorce sur les
parasites. Aujourd'hui, l'ennemi revient à la charge; il s'estencore