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                              LES FLAMANDS                                   395

idiome que son humble parler natal. Plusieurs de nos félibres,
Mistral et Aubanel entre autres, ont ainsi renoncé à manifester en
français leur génie, assez heureux d'y avoir fait leurs preuves...
   Voilà certes, aux yeux de bien des gens, d'étranges obstina-
tions. Mais l'amour du foyer les justifie, si le succès ne veut
pas les consacrer toujours.
                                 *

   Conscience était né à Anvers, le 3 décembre 1812. Son père,
Français d'origine, spéculait sur l'achat des navires 1 . Ce premier-
né qui était sa joie, le pauvre Pierre Conscience ne pensa pas
le conserver, car, comme Voltaire et V. Hugo, il fut d'abord
              Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix...
              Abandonné de tous excepté de sa mer.?.

   Sa mère était flamande. Elle avait appris au poète, dès le ber-
ceau, toutes ces chansons populaires qui devaient hanter sa mémoire
jusqu'à l'enflammer d'amour pour une langue qu'on méprisait.
   La jeunesse d'Henri Conscience ne fut pas heureuse. Il perdit
sa mère à 8 ans, et son père ne tarda pas à se remarier.
   L'isolement où il dut vivre, ainsi que l'indiscipline de son esprit
devaient faire de lui un romancier et un poète, nés d'une féconde
imagination et d'une habitude de mélancolie. Henri Conscience, dans
ses Mémoires (publiés par la Revue contemporaine, 1858), a
raconté ses origines. Engagé militaire après 1830, il devint bientôt
le poète de l'armée, où ses Chansons françaises devaient avoir leur
instant de popularité. Libéré avec le grade de sergent- major (1836),
Conscience recommença une existence pauvre et isolée, tour à tour
jardinier, employé aux Archives d'Anvers, et greffier d'une aca-
démie artistique. C'est alors qu'il jouit de ses premiers et admira-
bles débuts littéraires.
 . Car son heure —tout génie à la sienne — allait enfin sonner,
au milieu des grands événements sociaux qui achevaient de consti-
tuer l'indépendance de la Belgique.

  1
    11 était de Besançon. Après avoir servi comme chef timonier dans la marine Im-
périale, il fut fait prisonnier et, une fois délivré, s'é'ablit à Anvers.