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335                 LA R E V U E LYONNAISE
perdus réapparaissent comme dans une apothéose de féerie .emprun-
tant un éclat plus vif à la nouveauté orientale du climat et à l'inat-
tendu de la résurrection. En face de lui, un amphithéâtre gracieux
de maisons blanches, d'une blancheur d'écume et de neige, enca-
drées de verdure sombre, entre l'azur du ciel et l'azur de l'eau ;
derrière lui, au bout de l'horizon, une traînée lumineuse qui passe
du jaune à l'orange, de l'orange au pourpre, du pourpre à l'or, à
travers laquelle se laisse entrevoir d'abord l'illusion d'un phare,
puis, celle d'un incendie lointain, enfin, le feu d'artifice triomphal
du soleil levant, pâlissant le ciel, assombrissant la mer, découvrant
le cap Matifou, le Djurdjura, l'Atlas, à demi noyés dans un fin
brouillard rose, apportant la clarté, la chaleur et la vie, semant,
comme dans un conte des Mille et une Nuits, les étincelles et les
pierreries aux quatre coins du paysage. Richard venait de fermer
un livre où ces splendides impressions de l'arrivée étaient tra-
duites par cette phrase épique, digne d'un colleur d'affiches ou
 d'un peintre en bâtiments ; « L'aspect.généralest blanchâtre; » il
le jeta par-dessus le bord, convaincu qu'il le restituait à son
élément naturel et que de pareilles sécrétions pseudo-littéraires
devaient se produire entre deux coquilles, à l'abri des grands
 rochers couverts d'algues marines. Il eut en même'temps, en sa
 qualité de poète, c'est-à-dire de voyant, l'intuition très nette
 qu'il avait, du premier coup d'œil, aperçu le plus beau d'Alger et
 de la première bouchée, mangé le meilleur de son pain de voyage.
 Cette intuition était-elle exacte? il va nous l'écrire lui-même avec
 cette plume que je lui passe et dont il se servira mieux que moi.
    A peine le nouveau débarqué a-t-il gravi les rampes ou les
 escaliers de la Pêcherie, donné un regard d'admiration à la rade
 sans pareille où se balance, au milieu de vingt autres, le navire
 qu'il vient de quitter et au quai monumental d'une demi-lieue de
 long, qu'il tombe sur un grand rectangle bitumé, plein de foule
 et de bruit.' Dominé par un bronze équestre du duc d'Orléans
 d'assez fière allure, le cheval surtout, ouvert du côté de la mer,
 sauf en un coin où se dresse la masse imposante et étincelante de
. la principale mosquée, fermé sur les trois autres faces par de
 lourds édifices sans style, percé d'arcades à l'espagnole, flanqué
  de quatre kiosques où les éducateurs de la pensée locale entre-