page suivante »
DE LA R E S P O N S A B I L I T É L I T T É R A I R E 265 « Et Balzac ! oh ! sous les pas de ce géant, que de consciences écrasées, que de boue, que de sang! comme il a fait travailler les juges et pleurer les mères! Combien se sont perdus, ont coulé qui agitaient au-dessus du bourbier, où ils allaient mourir, une page arrachée à quelque volume de la Comédie humaine. « Il s'est trouvé des gens, des conscrits, pour prendre le roman à la lettre, le Sermon de Vautrin, coupé par le célèbre jet de sa- live, crachercomme lui,en homme supérieur, aunez de la société. » Enfin commentant de même le livre : Les grands hommes de province à Paris, Jules Valès conclut par son témoignage en di- sant : « J'ai vu s'en aller un à un, fil à fil, leurs cheveux et leurs espérances, et le chagrin venir, même le châtiment, en voiture jaune au galop des gendarmes. Qu'on a reconduit de brigade en brigade de ces illusions perdues ! » Je serais tenté de signaler à mon tour l'influence littéraire de ce Balzac peintre technique du vice, quelquefois de la vertu; metteur en scène de la corruption prise sur le vif, personnifiée à la façon héroïque en types restés historiques. A la lecture des pages de cet historien de la vie humaine criminelle et de la division de la con- science, combien d'âmes qui, sans être tombées dans la dégradation et la ruine, burinées par Jules Valès, ont succombé moralement à la pénétrante infiltration des vices de la société effrayants pour les forts, mais dévastateurs pour les faibles, pour les chercheurs de torts sociaux, pour les curieux dont la conscience est déjà tarée. Les victimes de ces livres pourraient être comptées nombreuses dans les rangs de la société où l'on serait moins disposé à les chercher. Je voudrais borner là les citations qui, quoique adaptées à mon sujet, me feraient oublier la bienveillante patience du lecteur. J'ai cru trouver pour rendre mon étude moins incomplète, de saisissantes applications. On pourrait, en effet, passer en revue les œuvres de tant d'autres écrivains, notamment de romanciers, non point cherchés dans les rangs infimes desauteurs de la littératureet dujournalisme abjects et cyniques dont la popularité de mauvais aloi a multiplié les lecteurs, mais d'auteurs rencontrés comme Balzac parmi les plus renommés, dont quelques livres ont pu charmer les lettrés, mais aussi dont les lecteurs à la recherche des sensations n'ont pu ré~