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LE COMTE DE CHAMBORD Depuis deux mois, nous assistions avec une pitié profonde et une inexprimable angoisse à la lutte que, sur une terre étrangère, l'auguste héritier de soixante rois soutenait contre là mort. Bien que la cruelle maladie dont il était atteint ne laissât plus guère d'espérance, noi*s nous plaisions encore à croire qu'un miracle le sauverait, et qu'une existence si noble, si pleine de dignité et d'honneur ne serait pas prématurément ravie, sinon à l'exemple, du moins à l'admiration et au respect universel. Nous nous trom- pions, hélas ! Dieu n'a pas permis que le prince qui personnifiait à un si haut degré les vertus chevaleresques et la vieille loyauté de notre race fût conservé à la France, et c'est le cas de rappeler une fois de plus le mot célèbre de Bossuet : « Tout est vain en l'homme, si l'on ne s'attache qu'à ses grandeurs ou à ses espoirs terrestres; mais tout est grand en lui, si on ne le regarde qu'à travers Dieu. » Notre Revue n'est pas un recueil politique, elle n'est liée à au- cun parti et ne s'est jamais hasardée sur le terrain de nos tristes dissensions civiles ou sociales. Il ne lui sied donc pas d'étudier dans Monsieur le Comte de Chambord le descendant d'une glorieuse dynastie et le représentant immaculé du principe monarchique ; la vie de ce prince, sacré par l'exil, appartient désormais à l'histoire ; celle-ci dira bientôt que, sans avoir jamais régné, il a été plus roi qu'aucun autre ; elle dira que nul héritier d'une couronne n'a maintenu plus intact son héritage et que nul n'a porté plus haut ni plus fièrement son drapeau. Mais, lorsque partisans ou adver- saires, tous nos compatriotes qui se respectent, lorsque le monde entier saluent sa tombe de leurs regrets et de leurs hommages SEPTEMBRE 1883. — T. VI- 15