page suivante »
116 LA R E V U E LYONNAISE M. J. d'Arbaumont, bien connu déjà par ses travaux consciencieux sur l'archéologie et l'histoire de Bourgogne. Il y a dix-sept ou dix-huit ans, nous avions déjà ensemble, dans la Noblesse aux États de Bourgogne, essayé de décrire la marche progressive des classes populaires vers les prérogatives, les hon- neurs, les dignités et la puissance de l'aristocratie pendant tout le moyen âge et surtout pendant les trois derniers siècles de la pé- riode moderne. Nous avions, je crois, réussi à établir qu'à part un très petit nombre de maisons nobles dont l'origine, perdue dans la nuit des temps, remontait peut-être aux races héroïques des Ger- mains et des Francs, la plupart, la presque totalité des familles qualifiées, même anciennes, avaient une souche plébéienne, et que les gentilshommes de nom et d'armes, inscrits comme tels sur les listes dupatriciat bourguignon, admis à raison de leur naissance aux fonctions et au rôle politique réservés au second ordre de l'Etat, s'y étaient graduellement élevés par leur vaillance, par leur labeur, parleurs services publics, par tous les efforts qui per- mettent à l'homme d'accroître^ses possessions avec son influence et d'assurer — ce qui est le terme ordinaire de l'ambition humaine — la durée, sinon la perpétuité de sa descendance et de son nom. Les familles ne se fondent ni ne grandissent autrement que les Etats et les nations ; elles naissent, vivent et meurent comme eux; le développement des unes et des autres est soumis à des lois iden- tiques et également immuables. Le sang bleu qui, disait-on autre- fois, caractérisait pour certaines générations une race distincte, supérieure et en quelque sorte privilégiée et d'élite, est une chi- mère non seulement en physiologie, mais en histoire. L'unité de l'espèce n'est pas moins une certitude pour le politique que pour le naturaliste. Le vrai, c'est que l'éducation, l'hérédité et, comme l'on parle aujourd'hui, la sélection développent et accroissent les qualités natives de la race que la nature a faite perfectible ; Dieu a dit à l'homme physique comme à l'homme moral : « Tu te perfec- tionneras ; il a sans doute pour le premier restreint cette faculté dans des limites plus étroites que pour le second ; mais il ne la lui a point refusée. Loin de s'offenser de cette thèse irréfutable de l'unité absolue de l'espèce, la noblesse ne peut que s'en glorifier; en cherchant ses origines et sa source dans le réservoir commun