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                LA C E R T I T U D E PHILOSOPHIQUE                   73
point de remplir une grande mission, c'est de la déserter ; ce n'est
pas d'enseigner la vérité, c'est de la compromettre et de l'ébranler,
c'est de l'avoir enfin à ce point abaissée, qu'on lui inflige commu-
nément aujourd'hui cette souveraine injure de la défendre au nom
de son utilité.
    Les philosophes critiques après avoir établi que la vérité ne doit
 pas nous contraindre, rejettent la vérité en alléguant qu'elle ne
 nous contraint pas. Ils affirment très justement que la croyance
 est libre, c'est-à-dire que la volonté doit jouer un rôle dans la
 connaissance et la possession de la vérité. Mais quel est ce' rôle?
En quoi consiste-t-il? Quel est, avec la raison absolue, le rapport
 de la volonté libre? Muets sur toutes ces questions, ils n'ont nulle
 part montré comment s'exerce cette liberté qu'ils réclament et quel
 est son rôle dans le choix des doctrines. En même temps qu'ils ont
justement repris les dogmatiste pour avoir placé dans la raison
qui est une la cause de la division des esprits, ils sont tombés dans
la même erreur : c'est toujours à la raison plus faible ou plus
puissante, plus crédule ou plus clairvoyante, qu'ils l'ont eux-
mêmes attribuée, en sorte que tout est fatal dans leur prétendue
liberté. Plus on approfondit leur théorie, plus on en reconnaît l'im-
puissance et la contradiction. Mobile, flottante,insaisissable comme
l'ombre, elle s'évanouit lorsqu'on la veut etreindre, elle recule
lorsqu'on s'y veut appuyer, elle a fait pis que nier la vérité, elle
l'aprofanée et découronnée, en la montrant comme le jouet de nos
passions et le fantôme de son imagination.
    Il est temps maintenant de faire connaître la doctrine au nom de
laquelleM.de Cossoles a dirigé contre ses adversaires des attaques
 si victorieuses. Dans cet exposé, nous serons forcément bref, parce
 que l'auteur, guidé par l'instinct de son talent, s'est moins attaché
à développer sa théorie qu'à porter à l'erreur des coups décisifs.
    La raison n'obéit jamais qu'à l'évidence; elle seule est juge de ce
qu'elle doit croire. Toutefois, l'évidence ne saurait régler la raison
sans le consentement de la volonté; selon le mot de saint Thomas,
« il faut que la volonté meuve la raison ». L'affirmation, pour être
certaine, réclame donc le concours delà volonté et de la raison. Mais
introduire dans l'adhésion à la vérité un élément de liberté, c'est y
introduire du même coup un principe de fixité et d'unité, puisque