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16 LA REVUE LYONNAISE place de Ye muet omnibus ; dites-moi, par grâce, si ce patois est si grossier qu'on le veut bien dire, et entre le français et lui, quel serait encore le plus voisin du nègre ? Et par excès d'obligeance, veuillez me dire, en outre, si ces pré- fets sont bien spirituels qui, par leurs circulaires, interdisent aux instituteurJ de laisser' les enfants parler patois entre eux. Pense-t-on, comme jadis Grégoire, que « l'unité française » en serait menacée ? ne vaudrait-il pas mieux, au contraire, qu'en apprenant tout le français possible aux petits gones, on leur ensei- gnât avec lui quelque chose du dialecte local, car ce dialecte a ses règles, ses principes, ces étymologies, tout comme une langue à faux-col et à queue- de-morue, et il serait bon qu'il ne se perdît pas. Un dialecte disparu, c'est une perte pour la philologie, pour l'histoire, pour la science en général. C'est même une perte pour la poésie, car tout ce que le paysan possède de poésie, les légendes, les vieux contes, les vieilles chansons, les vieux noëls, il ne l'a que par le patois. Otez-lui par-dessus la religion, ce qu'on est en train de faire, et vous lui aurez enlevé tout ce qui n'est pas le pur souci des intérêts matériels ; vous en aurez fait l'égal de ses vaches ; que dis-je ! d'un électeur de M. Brialou !