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En ses poings tint une hache tranchant.
Hautement crie : « En vain tu te défends ;
Et si tu bouges, je te ferai dolent ! ».
L'entend le comte, bien grand peur lui en prend (i),
Pourtant le frappe de l'épéë tranchant,
Jusques aux dents le va tout pourfendant,
Et son épée y brise.
Dessur les armes du félon Sarrasin
Brisa le comte son bon brant acéré.
Toute la lame en acier poitevin
Reste en la tête au félon Barbarin,
Au poing lui reste le pommeau en or fin.
Quand voit le comte au courage loyal
Qu'il a brisé son bon brant acéré,
Sitôt pensa venu être à sa fin.
Il se défend de son bon cor clairin :
Au premier coup en tue un Sarrasin,
Mais rien ne sert ni lui vaut un denier,
En nombre est trop la race de Caïn,
Il pria Dieu, qui de l'eau fit du vin
Quand fut aux noces de saint Archetreclin,
Que de mort le défende.
Quand voit le comte Aimeri le prisé
Qu'arme n'a plus pour sa vie protéger,
Du cor qu'il tint leur va grands coups donner,
Et par le champ en fait débris voler.
Et comme il vit que plus ne peut durer,
Et qu'il n'a plus ailleurs où s'adresser,
Les étriers va de l'arçon tirer,
Quatre païens en a pu assommer.
Voilà Bauduc, le riche roi vanté,
A qui il prit la tour de Balaguer,
Vit Aimeri, se prit à lui crier :
(i). La " peur " d'Aimeri, sentiment humain au milieu d'exploits surhumains, est peut-être, dans
l'esprit du trouvère, une défaillance de l'âge, comme le trait final de l'épisode, cette reddition "pour
sauver sa vie ".