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                 UNE VILLE DU MOYEN AGE                     235

titre invariable : Blanquette de Limoux. La blanquette de
Limoux est un petit vinaigre mousseux récolté dans les
environs, avec lequel ces cloportes s'enivrent.
    C'est au haut d'une de ces ruelles, au pavé mérovingien,
infestée de ces choses odieusement modernes, que l'on
aperçoit, étincelant, le bijou inestimable qui s'appelle
Saint-Nazaire.
    L'aspect extérieur n'en est pas précisément jovial. La
façade principale, qui domine de sa haute stature les tours
les plus élevées de l'enceinte, est elle-même un admi-
rable morceau d'architecture militaire. Point de flèches,
aucun clocheton, un simple rectangle de granit, crénelé;
au lieu de vitraux, de minces meurtrières dont les filets
 noirs strient çà et là une surface lisse, brunie par le hâle
 des siècles; on voit tout de suite que les clercs et chapelains
 de ce temple-ci ne devaient pas avoir froid aux yeux, et
 que du haut de cette muraille rébarbative, il a dû pleuvoir
 plus de boulets de pierres et de traits d'arbalète que de
 bénédictions.
   On pénètre dans la nef par une petite porte dérobée
derrière un contrefort où il est assez difficile de la deviner.
Cette nef est romane ; du roman le plus sévère et le plus
pur. C'est dans un pareil décor que durent se jouer les
terribles scènes de famille des premières races : Jean-Paul
Laurens s'en est sûrement inspiré pour écrire sur la toile,
d'une façon si farouche, les sombres tragédies mérovin-
giennes et carlovingiennes dont il a fait sa spécialité.
   Ce style dramatique et puissant sert admirablement de
transition entre l'architecture obsidionale de la façade et
les éblouissantes clartés du chœur. Je ne crois pas que
nulle part,—et je ne fais exception pour aucune de nos plus
belles cathédrales gothiques, — l'art ogival se soit élevé Ã