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POÉTIQUES CONTEMPORAINES 265
Où je lisais le ciel avec mon vieux berger.
Il ne reste plus rien en mon cœur d'étranger.
Je ne me souviens plus de l'exil, de la lampe
Allumée au foyer triste et froid, de l'estampe
Où revivaient les traits effacés du pays.
Je t'adore, maison, avec tes champs de lys,
Je te contemple encor, évidente, réelle.
Ta terre avait gardé toute mon âme en elle ;
J'ai bu l'eau de ton puits qui rêve au bord des prés
Et j'ai pleuré la joie à l'ombre des cyprès.
Le lyrisme de J. Gasquet jaillit comme un torrent pur
dévalant de l'Olympe. Il éclate, il se diffuse, il jaillit en
vers frappés ; il se disperse en phrases amoureuses ; il
frémit de sensibilité nerveuse ; il est la proie de toutes les
idées généreuses qui sollicitent l'âme des jeunes gens
réfléchis et talentueux. Tantôt son patriotisme fougueux
évoque une France victorieuse et redoutée ; tantôt la ten-
dresse lui dicte des mots d'amour :
Sur la blanche maison un jour heureux commence.
L'Aube caresse les volets,
Sous les beaux marronniers d'où s'en va le silence
Frissonnent les rosiers mouillés.
La lumière descend des collines vermeilles ;
A travers les grands blés où marchent des lueurs,
Enfant, pendant que tu sommeilles
Chantent déjà les moissonneurs.
Viens, nous irons mêler la tendresse lyrique
De notre amour renouvelé
Au paysage ardent, au poème biblique
Qu'au grand soleil chante le blé.
J'ai poussé les volets, regarde, le village
Brille sous son clocher comme une églogue d'or,
Le matin vient sous le feuillage
Eveiller ton rire qui dort.
Beaux vers, certes ! et que le grand Hugo aurait approuvés.