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2 54 CONSIDERATIONS SUR QUELQUES ECOLES Et voici une pièce intitulée Y Automne d'un charme rare et ingénu à la fois : Voici venu le froid radieux de septembre : Le vent voudrait entrer et jouer dans les chambres ; Mais la maison a l'air sévère, ce matin, Et le laisse dehors qui sanglote au jardin. Comme toutes les voix de l'été se sont tues ! Pourquoi ne met-on pas de mantes aux statues ? Tout est transi, tout tremble et tout a peur ; je crois Que la brise grelotte et que l'eau même a froid. Les feuilles dans le vent courent comme des folles ; Elles voudraient aller où les oiseaux s'envolent, Mais le vent les reprend et barre leur chemin : Elles iront mourir sur les étangs demain. Le silence est léger et calme ; par minute Le vent passe au travers comme un joueur de flûte, Et puis tout redevient encor silencieux. Et l'Amour qui jouait sous la bonté des deux S'en revient pour chauffer devant le feu qui flambe Ses mains pleines de froid et ses frileuses jambes, Et la vieille maison qu'il va transfigurer Tressaille et s'attendrit de le sentir entrer. . . Personne n'excelle comme Mme de Noailles à nous donner des visions champêtres d'un paganisme aussi exquis. Gaston Deschamps, en rendant compte du Cœur innombrable a très heureusement noté « le panthéisme libé- rateur » de ces poèmes ( i ) . C'est que leur auteur ne s'est pas amusé à faire de la rhétorique, à combiner les sou- venirs plus ou moins égrillards que Méléagre ou Théocrite laissent dans la mémoire des collégiens adultes qu'on appelle les hommes. Naïvement, comme le regretté (i) Temps du 7 juillet 1901.