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POÉTIQUES CONTEMPORAINES 245 fournir au foyer blêmissant de leur Muse l'huile vierge nécessaire pour lui redonner une nouvelle vigueur ? On peut se le demander. * M. Gustave Kahn caractérise très heureusement en ces termes l'Ecole symboliste : « Le Parnasse est la dernière période du Romantisme. Le Symbolisme est la résultante du Romantisme en son évolution. Le Romantisme a donné avec le Parnasse sa floraison dernière, en sa forme maintenue, et il s'est mué en Symbolisme en léguant au Symbolisme son appétit de nouveauté, sa recherche d'un coloris neuf, sa tendance à l'évolution rythmique, c'est-à -dire son essence même. » Et qu'on le veuille ou non, la chose est très vraie. On a beaucoup ridiculisé les Symbolistes. On ne leur a épargné ni le mépris ni les injures. En réalité, on a été sou- verainement injuste à leur'endroit. Et je suis d'autant plus à mon aise pour le déclarer que je n'appartiens pas à leur groupe. Mais je n'apprécie pas moins hautement leurs tentati- ves dont plusieurs ont abouti à un éclatant résultat. La plupart du temps, d'ailleurs, ceux qui attaquent les Symbolistes ne les ont pas lus. Ils ignorent les Palais Nomades de M. Gustave Kahn qui contiennent des poèmes d'un sens exquis, tels ces Paysages de Provence que je ne puis lire sans émotion, malgré qu'en vers libres. Ils ignorent Verhœren et ses Villes tentocu- laires et ses adorables Petites légendes. Ils traitent avec dédain Vielé-Griffin dont les Cygnes, la Chevauchée d'Yeldis et cer- taine légende de Sainte-Agnès sont de pures beautés. D'Henri de Régnier, ils n'admettent que ses vers réguliers, alors que les pages des Roseaux de la Flûte, d'Aréthuse, de Tel qu'en songe et de la Corbeille des heures contiennent des poèmes dont le défaut de rythme classique ne diminue pas un ins- tant l'harmonie et l'inspiration.