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244 CONSIDÉRATIONS SUR QUELQUES ECOLES Leconte de Lisle, que de parcourir les œuvres de leurs élèves engagés sur la même voie que celle du maître, du chef de file respectif, et rééditant, moins bien, les mêmes choses ? On me dira : mais l'originalité est rare. Je répondrai : En êtes- vous bien sûrs ! De fait, quand on se tient au courant, on est frappé de la vigueur et de la personnalité de certains talents. Mais poursuivons l'exposé de notre enquête. Nous venons de parler des intransigeants de la poésie, dont M. Sully Prudhomme se fait le porte-parole. Ceux là sont férus de la rime riche à un degré extraordinaire. Pour eux, un poète à rimes insuffisantes ne vaut rien, témoin Musset, que beaucoup de Parnassiens, — sinon peut-être tous, — n'aiment point. Poète, Musset, jamais de la vie! Il ne fait que de mauvais vers ! C'était, d'ailleurs aussi, le jugement de Baudelaire et Gautier. On peut regretter que leurs descendants le propagent. Au surplus, c'est leur affaire et cela ne fait aucun mal à la gloire de Musset. Quand les Parnassiens arrivèrent, ils furent reçus fraîche- ment par leurs aînés, un peu à la façon dont ils se condui- sirent eux-mêmes à l'endroit des Symbolistes. C'est qu'une .école officielle n'aime jamais à voir s'élever auprès d'elle une autre école menaçante pour sa sécurité. M. Gustave Kahn, dans sa remarquable étude sur le Parnasse et l'Esthé- tique Parnassienne ( i ) , a montré, avec la plus grande clarté, comment, au lieu de continuer l'évolution romantique, les Parnassiens l'ont arrêtée. Ils avaient reçu le feu sacré des mains de leurs aînés. Mais ce feu, à cause d'un aliment insuffisant, finit par jeter un éclat de plus en plus pâle. Les mânes de Chénier le préserveront-ils ? Qu'ils soient alexandrins ou élégiaques, les élèves Parnassiens sauront-ils ( i ) Revue Blanche, du i c r septembre 1901.