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 256                        NÉCROLOGIE

simple nouvelle, on en vit paraître, un jour, tout un recueil
sous le titre : Les Histoires de Puitspelu, avec la mention
quelque peu narquoise : en vente à Lyon chez les libraires
qui en voudront (1886), et bientôt après (1889), tout un
volume de poésie : Pauca paucis, c'est-à-dire : Quelques
vers pour quelques amis, qui venait nous révéler un
nouveau poète, animé d'un souffle puissant et vivement
épris de la forme antique ?
   Tout cela était bien fait pour donner un démenti au
vieux préjugé lyonnais et, cette fois, il fallut bien convenir
que le vrai talent ne doit pas être circonscrit dans des
limites aussi étroites qu'on le pense trop souvent, et qu'un
artiste peut se révéler poète, habile écrivain et même érudit
à ses heures, sous la seule condition d'être un homme
d'esprit.
    À ce moment, il est vrai, Clair Tisseur avait quitté Lyon
 et abandonné l'exercice de la profession d'architecte. Mais
qu'importe ? N'avait-il pas donné suffisamment la mesure
d'un grand talent dans l'exécution de ses œuvres architec-
turales, dont plusieurs font l'ornement de notre ville?
    Et puis, s'il avait quitté Lyon, ce n'était ni par indifférence,
ni par dédain. Son départ lui était imposé par les soins à
donner à sa santé, qui avait été toujours frêle et délicate et
qu'avait affaiblie encore le travail soutenu, auquel il s'était
livré pendant le cours de sa carrière d'architecte. Pour le
repos qu'il recherchait, il lui fallait une retraite paisible,
loin de la foule et du bruit, assez près encore de sa ville
natale, mais bien au soleil et à l'abri du vent glacé du nord.
   Il la trouva à Nyons, presque sur les confins de la Pro-
vence. Et c'est là, au milieu de ses fleurs, sous le ciel
radieux du Midi, et dans une demeure modeste et appro-
priée à ses goûts, que ce sage a vécu depuis près de vingt