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6Q                   MON AMI GABRIEL

préférait encore la grosse gaité franc - comtoise de
M, Delprat lui-même.
   Un soir, Gabriel était allé faire sa. visite accoutumée
par un'soleil couchant semblable à une auréole de pous-
sière d'or. La convalescente était seule près de la fenêtre
du petit salon, devant un guéridon incrusté d'ivoire sur
lequel se trouvaient ses journaux et ses livres ; elle sem-
blait plus isolée que jamais. La pièce était à peine éclai-
rée; cette journée splendide n'y laissait pénétrer ni un
rayon de soleil ni un sourire. Les oiseaux jetaient leurs
derniers cris dans les arbres et l'on n'apercevait dans
l'intervalle dès rideaux qu'un ruban de ciel clair et lim-
pide.
   A la vue du jeune homme, Nelly battit des mains
comme un enfant :
  — A la bonne heure ! s'écria-t-elle le sourire aux
lèvres,. Si vous, saviez combien je suis reconnaissante
de votre exactitude ! combien je me suis trouvée triste
et abandonnée aujourd'hui... Voyez ! voilà ma seule
distraction.
   Gabriel se baissa et vit un dessin algérien que Nelly
avait tracé sur un éventail ; il la félicita de son bon
goût etde son habileté ; puis il vint à parler des indus-
tries de ce pays où il avait passé plusieurs années. Nelly
lui fit vingt questions bizarres ; et de temps en temps,
sans y songer, elle jetait sur son visage un regard pro-
fond et impénétrable.
   — Les étrangers continuent-ils à venir ? demandait-
elle. Voyez-vous des visages tristes et souffrants ? . . .
Mais croyez-vous vraiment au bonheur ici-bas ? Puis,
se reprenant : — Ah ! j'ai tort de vous assombrir .ainsi.
Vous accomplissez ici une, œuvre de charité, mais je ne
veux pas mettre votre générosité à l'épreuve de ma