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POÉSIE, AMOUR ET MALICE. 61 connu. Je poussai même mes scrupules, à cet égard, jusqu'à rester bloqué dans le comptoir de mes chefs, sans oser en sortir pour aller dîner, alors que je la voyais se promener sur le quai de Retz en face de mon bureau; l'idée d'en être remarqué me faisait renoncer à mon repas que sa vue remplaçait délicieuse- ment pour moi, car je ne la quittais point du regard, tant qu'elle allait et venait devant les fenêtres. Bientôt je quittai Lyon et le souvenir de cette aimable femme me suivit longtemps encore après mon départ ; je lui adressai même quelques lettres, puis, de nouveaux attachements prirent dans mon cœur une place qui, cependant, ne lui fit point perdre complètement la sienne; et, lorsqu'il y a quelques années, j'appris sa mort dans les papiers publics, je donnai de vifs et sincères regrets à sa mémoire ; il me sembla que les plus pures et les plus fraîches illusions de ma jeunesse étaient descendues dans la tombe avec elle. TROISIÈME PARTIE. MALICE. J'habitais à Lyon la maison de M. Lebœuf, située à l'angle de la rue Bât-d'argent faisant face à la rue Henry ; j'étais logé chez M. George Mussard, l'un des représentants de la maison commerciale de mon père et de mes oncles ; atteint d'une gas- trite qui le fatiguait beaucoup, M. Mussard, se conformant aux conseils du célèbre docteur Marc-Antoine Petit, se décida à pas- ser à la campagne t'été de 1811 ; je le suivis donc dans une jolie habitation appartenant à M. F..., maire du faubourg de Vaise. Elle se trouvait située sur la haute colline qui domine la Saône coulant à ses pieds. Après y avoir passé la nuit, je me rendais chaque matin à Lyon par un chemin qui passait à côté de l'homme de lu Roche, statue informe du grand citoyen nommé Cleberger, lequel eut plusieurs rapports avec Genève et dont une partie du