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DE LA PERFECTIBILITÉ HUMAINE. 489 ment. S'iln'ose, en termes explicites, assurer l'homme del'immor- talité en ce monde, en réalité cependant, c'est l'immortalité qu'il lui promet, lorsqu'il dit: « Serait-il absurde de supposer que ce perfectionnement de l'espèce humaine dût être regardé comme susceptible d'un progrès indéfini, et que la moyenne de la vie dût croître de telle sorte, qu'il ne serait point de terme au- delà duquel elle ne puisse s'étendre, point de quantité détermi- née qui puisse lui être assignée comme limite. » 11 est vrai qu'il ajoute que l'homme ne deviendrait pas sans doute immor- tel. Mais, quelle est donc la différence entre cette vie qui n'aura plus de fin, et l'immortalité ? Emporté aussi par cette fausse idée d'un progrès illimité de l'homme terrestre , Fichte, dans son livre sur la Destination de l'homme , ne s'égare pas moins, quoique en un autre sens, que Condorcet lui-même. En effet, il prédit que, dans une société plus parfaite, personne n'ayant plus d'intérêt à faire le mal, le mal disparaîtra, la pensée même du mal s'effacera de l'intelligence des hommes, et que la lutte entre le bien et le mal sera radicalement terminée par l'anéantisse- ment du mal (1). Faut-il plus croire à Fichte, prédisant l'anéan- tissement de la pensée même du mal, qu'à Condorcet, prédisant l'anéantissement de la mort ? Après Fichte et Condorcet, je pourrais citer quelques autres penseurs qui, bien que d'un ordre moins élevé, ont réussi à faire, des disciples et une école. A les en croire, la perfectibilité aura pour effet de nous dispenser de tout effort pénible, soit au- dedans, soit au-dehors de nous-mêmes, de convertir tout tra- vail en un divertissement, de faire sortir le bien général de l'af- franchissement de toutes les passions, de nous doter de nouveaux organes, et de bannir la douleur, sinon la mort. D'où viennent ces dangereuses et ces ridicules erreurs? Elles viennent, soit d'une idée fausse de la nature même du progrès de l'homme et de la société, soit de l'ignorance des bornes et des conditions essentielles de la nature humaine. En effet, c'est de l'idée de la destinée de l'homme que dépend l'idée de sa perfec- (i) Destination de l'homme, troisième partie, de la Croyance.