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DE NAPOLÉON A LYON. 99 Jeunes tous deux, et jouissant pour la première fois d'une en- tière liberté, ils commencèrent dans notre ville leur vie d'offi- ciers. Leur bourse fut très-vite épuisée, et ils étaient fort embar- rassés pour continuer leur route, quand, heureusement pour eux, ils rencontrèrent un jour, en revenant de Fourvières, M. Barlet, ancien secrétaire de M. de Marbeuf. Il reconnut le jeune Buonaparte ; ayant appris la position des deux amis, il les emmena dîner avec lui, et leur fournit les moyens de regagner leur garnison. Mais, une fois leurs finances remontées, ils ne se pressèrent plus de partir, et, c'est presque aussi légers d'argent qu'avant la rencontre de M. Barlet, qu'ils quittèrent à pied notre ville le 30 octobre pour aller coucher à Vienne, d'où ils-se diri- gèrent ensuite sur Valence ; ils y arrivèrent le 2 novembre. III. Une malheureuse circonstance ne tarda pas à ramener chez nous ces deux lieutenants, et occasionna le plus long séjour que Napoléon ait fait à Lyon. L'éternelle question des salaires, une augmentation de deux sous par aune dans la façon du taffetas,un conflit de pouvoirs dé- terminèrent, le 10 août 1785, sur la place des Terreaux, une san- glante collision (1), et amenèrent, dans les quarante-huit heures, l'exécution de trois ouvriers, considérés comme les chefs de l'é- meute. Cette exécution fut commandée par le prévôt de la Maré- chaussée, le baron d'Izeron, en dépit des promesses faites par MM. les comtes de Lyon qu'aucune poursuite n'aurait lieu , avant le retour de M. de Clugny, envoyé à 'Paris pour implorer le Roi. M. de Clugny revint avec des lettres de grâce, mais il était trop tard. A peine descendu de cheval, il se rendit tout poudreux et botté au théâtre, où se trouvait le baron d'Izeron ; il se fit ouvrir sa loge, lui reprocha sa perfidie, et le souffleta. Un duel s'en suivit ; il eut lieu, dit-on, sur la terrasse du Clave- cin, que l'on voit encore à l'angle de la rue Royale et de la rue (i) Voir la Revue du Lyonnais, t. XII, p. 210 et 216.