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296 LA TENTATION. Pour qui ne sait qu'aimer, l'homme veut, souffre et pense ; Son front reçut pour tous, en sa noble pâleur, Avec la liberté le bandeau de douleur. Oui ! de ton œuvre, ô Dieu, la douleur est proscrite, Notre globe est le seul qui souffre et qui mérite; Car toi, tu ne veux pas, père tendre et clément, Que même un vermisseau souffre inutilement. Du sel de la douleur ta main fut économe, Et tu l'as concentré sur le séjour de l'homme. Ah ! quand nous y portons notre croix à genoux, C'est trop, Seigneur, c'est trop, si ce n'est que pour nous ! Mais tous sont rachetés par nos larmes fécondes ; Oh ! l'homme en verse assez pour payer tous les mondes ! Tous les anges aussi, par instant soucieux, Sur l'astre des douleurs jettent d'en haut les yeux ; Le trône de Dieu même et ses vivantes flammes Ne leur font oublier ce Calvaire des âmes. Oui, chaque être avec nous se relève ou s'abat. Le prix dépend pour tous de celui qui combat. Mais du démon vaincu répandant la nouvelle Des messagers divins l'hosanna la révèle. Le peuple des esprits, tous les purs habitants De ces soleils où règne un éternel printemps, Le radieux essaim des oiseaux de l'Aurore Qui ne peut plus tomber mais peut monter encore ; Tous ceux dont notre chute attristait le bonheur ; Les séraphins vivants de l'amour du Seigneur, Et ceux que voit le ciel, en un moins doux partage. Aimer moins ardemment et savoir davantage,