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THÉOPHILE GAUTIER I35 resta longtemps sur le cœur du pauvre grand artiste que la nécessité contraignit au silence et à continuer sa collabora- tion au journal. La cause de la semonce que le « grand maître du journalisme contemporain » infligea à son colla- borateur, provenait de ce que celui-ci avait affirmé que les poètes n'avaient pas de quoi vivre et en étaient réduits à l'hôpital ou à se lancer dans le feuilleton. Je me demande comment une vérité de ce genre pouvait offenser M. de Girardin. IV Telle est la vie de Théophile Gautier; telle est son œuvre. Ce sont de jolis et aimables horizons que M. Richet nous a ouverts sur une période littéraire intéressante et qu'il évoque d'une agréable façon. Tous les amis des Belles- Lettres voudront lire cette courte et intéressante étude sur le grand Rêveur. Le positivisme chaque jour grandissant du siècle empoisonna ses dernières années, mais celles-ci furent attristées plus encore par la gêne qui vint avec l'âge s'asseoir à son foyer. Quelle mélancolie pour les intellectuels de penser que sur ses vieux jours Théophile Gautier, tout célèbre qu'il était, ne toucha qu'une misérable pension de 3.000 francs et que sans l'intervention de M. Jules Simon, il n'eût peut- être pas touché cette somme jusqu'à sa mort qui survint en 1872! Le pauvre Théo en avait pourtant grand besoin, car le travail de la pensée nourrit toujours fort insuffisam- ment des êtres tout d'imagination comme lui. On peut l'en plaindre mais non l'en blâmer, car nul n'échappe à sa destinée. Pierre de BOUCHAUD.