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;6o LES CONFESSIONS DE M me ARTHUS Son bonheur fut vite interrompu. Entre temps, un inci- dent de douane avait démontré aux gouvernements fran- çais et espagnol la nécessité de fixer, d'un commun accord, un point de la frontière situé dans une zone vague et insuf- fisamment déterminé. M. de Regnaudy, appelé à faire partie de la Commission mixte de délimitation, dut se rendre sur les lieux. A peine put-il, au cours des travaux, s'échapper et venir une fois ou deux à Saint-Christol. Lors de la clôture des opérations, il y eut, comme d'usage, grand banquet dans la sous-préfecture la plus rap- prochée de l'endroit. Le préfet du Pas-des-Pyrénées et le consul d'Espagne s'y rencontrèrent avec les autorités de Ira los montes. C'était en plein mois d'août, et le retour au chef-lieu s'effectua par une splendide soirée, M. de Regnaudy ayant été invité à prendre place dans la voiture du préfet et du consul. Or, Saint-Christol est sur la route. L'administration du casino a préparé une magnifique réception au préfet : l'éta- blissement des bains et tous les hôtels ont illuminé; un souper est servi sous la grande vérandah, et c'est aux accords de la Marseillaise jouée par l'orchestre du casino et la fan- fare municipale, que le premier magistrat du département gravit le grand escalier. Le souper était bon, les toasts furent nombreux, on fit le tour des salles de jeux. Il était fort tard. Aussi le préfet, fourbu par la fatigue d'une longue et chaude journée, accepte-t-il assez aisément l'idée de coucher à Saint- Christol, qui lui est suggérée par M. de Regnaudy. Du reste, il n'ignore pas que le colonel courtise une veuve en résidence au grand hôtel des Bains, et il n'est pas fâché peut-être qu'une occasion lui fasse connaître l'héroïne d'un roman dont jasent tous les salons du chef-lieu. On prend donc gîte au grand hôtel.