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348           LES CONFESSIONS DE Mme ARTHUS

 nement surpris lorsque, deux ans plus tard, après m'avoir
 confié qu'elle était sur le point de vendre son fonds de
 commerce, elle m'invita à l'aller voir quelquefois en pas-
 sant, dans une jolie maisonnette qu'elle faisait aménager,
 aux portes de la ville.
   Je l'y trouvai, en effet, peu de mois après. L'habitation,
tout au fond d'un jardin, donnait sur une sorte de mail dont
elle étair séparée par une claire-voie.
   Au moment de mon arrivée, Mme Arthus était installée
 sous la marquise d'entrée, en compagnie de ses enfants :
l'aîné, un amour de fillette aux longs cheveux, blonds et
bouclés, âgée alors de six ans et occupée à ses leçons ;
l'autre, un garçonnet de quatre ans, tapageur comme il
sied à cet âge, remuant à la pelle la « grève » dont les allées
étaient garnies.
   La jeune femme m'accueillit par un : « Ah ! vous voilà ! »
des plus engageants. Il y aurait eu de ma part outrecuidance
à y voir autre chose qu'un témoignage du plaisir généra-
lement éprouvé par les gens retirés des affaires, lorsqu'ils
trouvent à rompre la solitude qui s'est faite tout d'un coup
autour d'eux. Je n'en serrai pas moins avec empressement
la main qui m'était tendue et je donnai une caresse aux
deux enfants accourus à moi comme à vieil ami.
   La conversation s'engagea très banale. Elle me parla du
temps, des affaires; je la questionnai sur son installation,
sur ses enfants. Mais il se produisait des silences; à cer-
taines réticences, à certains mouvements muets de ses
lèvres, au bord desquelles les mots venaient échouer, je
devinais qu'une idée l'obsédait et qu'elle cherchait comment
elle pourrait s'en ouvrir à moi.
   J'avais remarqué en entrant que, sans avoir dépouillé la
sombre livrée des veuves, elle portait sur sa robe noire un