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338 ÉTUDES SUR QUELQUES ANNEES s'il n'avait pas été prévenu de ce qui se passait dans l'en- tourage de Louis XIII. Le favori du moment était Saint- Simon, celui que Bassompierre appelle le Petit Punais. Il tenait le parti du cardinal. En quittant la reine-mère, Louis XIII lui demanda : Eh bien, que dites-vous de cela ? En vérité, répondit le favori, je crois être dans un autre monde. Mais enfin, Sire, vous êtes le maître. — Oui, je le suis, répliqua le roi, et je le ferai sentir. — Saint-Simon se hâta de faire connaître le fait au cardinal de La Valette qui, aidé par ce renseignement, détermina Richelieu à suivre le roi à Versailles. Mme de Combalet et Bouthillier s'étaient rangés à son avis ainsi que quelques autres personnes sur- venues pendant ces pourparlers. Mais afin de ne prendre une aussi grave détermination qu'en toute connaissance de cause, on décida que le cardinal de La Valette retournerait à l'hôtel des Ambassadeurs extraordinaires, voir si le roi y était encore et prendre l'air de la Cour, ce qu'il fit de suite. Comme il y arrivait, le roi le fit venir pour lui commander de dire à Richelieu de le suivre sans délai à Versailles. Louis XIII n'avait pas pris sans peine une telle décision. Quoique poussé au parti de Richelieu par Saint-Simon, il était hésitant. La raison lui commandait de soutenir son ministre, mais le sentiment lui faisait un devoir d'obéir à sa mère. Il eut là des heures douloureuses : « L'incertitude dont son esprit était agité, dit Saint-Simon, se peignait dans ses mouvements; il se promenait à grand pas, se jetait sur son lit, se relevait précipitamment, buvait, cherchait à la fenêtre la fraîcheur de l'air, ouvrait ses habits comme un homme qu'un feu intérieur aurait dévoré. Dans cet état, un mot de son favori fut comme un trait de lumière qui le décida. Je