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                      AVEC L'ABBÉ DE BARRUEL                           41


                                     Paris, 26 janvier 1784.

I J'imagine, mon cher frère, que vous aurez reçu, en ce moment, et à
peu près lu, les deux volumes de nos Helviennes... Vous aviez trouvé la
tête volcanique de Giraud-Soulavie un peu trop ménagée dans la réponse
que j'avais insérée dans le journal de Monsieur. Pour le coup, vous me
ferez peut-être le reproche opposé. Mais, en vérité, peut-on y tenir
quand on lit des systèmes anti-mosaïques publiés avec tant de confiance
et si détestablement combinés ! Franchement, où pouvais-je loger ail-
leurs qu'au petit Berne et cette tête et toutes celles que j'y ai placées !
Ce n'est pourtant pas tout encore; il faudra y revenir pour en entendre
bien d'autres. En attendant, salut à tous nos Helviens, etc.


                                     Paris, 7 décembre 1784.

   Mon cher Père, un petit tour d'adresse de M. Soulavie m'a empêché,
depuis quinze jours, de répondre à votre dernière lettre; vous allez voir
à quoi il a abouti. N'espérant pas. sans doute grand'chose des voies de
la justice, il a cru pouvoir plus aisément surprendre l'autorité, et y a
réussi pour un moment, en faisant croire au Garde des sceaux que la
Genèse qui se trouve au second volume des Helviennes n'appartenait
nullement à cet ouvrage, et que les deux derniers volumes, eux-mêmes,
avaient paru sans permission. En conséquence de son mémoire, la vente
des Helviennes fut suspendue et tous les exemplaires restant encore chez
mon libraire furent saisis, sans que mon libraire, mon censeur ou moi
en eussions été prévenus. Le prétexte nous divertit d'abord, mais le
coup était porté; il aurait formé un préjugé contre moi et il fallait se
dépêcher d'obtenir mainlevée. C'est aussi ce que nous avons fait et la
petite ruse n'a servi qu'à révolter bien des gens contre son auteur. Son
triomphe éphémère m'a fait avoir une nouvelle approbation, une nou-
velle permission bien exprimée particulièrement. Quant à la partie qui
le regarde, il n'a pas été plus heureux auprès du cardinal de Luynes
que, dans sa requête, il citait contre moi; car, s'il y eût un compliment
flatteur, c'est celui que j'ai reçu de ce prélat lorsque, me voyant entrer
chez lui après l'invitation qu'il m'en avait faite, il me répéta plusieurs
fois ces paroles : « Il me manquait un plaisir en lisant votre ouvrage,