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206 DU PHÉNOMÈNE n'aient pas su lire assez couramment dans un livre de physiologie et de mécanique pour se rendre compte d'un fait banal, si des savants de premier ordre n'ont pas tous lu de la même manière. En effet, dans quelle partie d'un traité quelconque de physiologie peut-on se procurer des renseignements qui permettent de se former de ce phénomène une idée en dehors de toute contesta- tion ? Dans quel livre d'anthropologie puiser des notions suf- fisantes , je ne dirai pas pour expliquer le phénomène dont nous parlons, mais seulement pour nous rendre compte d'une manière a peu près plausible des fonctions ordinaires de mouvement et de sensation? Reconnaissons qu'il ne nous est permis que de balbutier quelques paroles qui se rapportent le plus souvent à l'existence présupposée de contingents abstraits , créés arbitrairement pour le besoin de la cause. Si la physiologie anatomique est, pour ainsi dire, à l'état de science achevée, il est bon de se rappeler que la physiologie dynamique et fonctionnelle est tout à fait dans l'enfance. Ceci comme circonstances atténuantes pour les uns aussi bien que pour les autres. L'étude des faits organiques expose à faire fausse route à chaque pas. Soyons donc indulgents, soit que nous croyons avoir saisi la vérité, soit qu'encore dans les ténèbres, la conviction d'autrui nous paraisse une illusion. Tâchons, comme le dit M. Babinet, d'avoir raison raisonnablement, mais écartons avec soin l'emploi de paroles blessantes telles que ridicule, impossible, absurde, qui ne sont ni de notre temps, ni dans nos mœurs , ni même de notre intérêt à cause du danger de les voir renvoyer à la source. M. Chevreul, en glanant dans nos systèmes myologiques , s'est contenté d'y ramasser quelques frémissements, quelques titilla- tions, qui s'échappent sans le concours de la volonté. D'après le savant chimiste, ces mouvements petits, faibles , délicats, im- puissants , bons tout au plus à faire osciller la bague-pendule, acquièrent par l'accumulation un certain degré d'intensité lorsque plusieurs personnes réunies se livrent synergiquement au plaisir de faire tourner une table. Il se peut que, malgré la plus rigou- reuse insensibilité des bras et du corps, certains mouvements trouvent moyen de se produire ; il se peut même que ces mou- vements s'effectuent à notre insu. Aucun fait physiologique ne nous oblige à en convenir, mais nous en convenons, ou pour mieux dire, nous n'avons pas besoin de demander des preuves de ces mouvements, du moment que pour que le phénomène ait lieu il n'y a pas besoin de la coopération de plusieurs personnes , une seule parvenant à le produire. Je sais que, dans ce cas, on pourra accuser l'opérateur de plaisanterie ou de mauvaise foi, soupçon auquel on pourrait répondre que, d'après M. Babinet, l'agglomé- ration des fractions de mouvements est inutile, puisque chacun de ces mouvements a une force considérable presque assez irré- sistible pour n'avoir besoin d'aucune coopération. La qualification