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182                          DE L'ORIGINE

l'autre sans se pénétrer, et désormais se mêlant ensemble pour
préparer et former la nationalité française.

                                  § 3.

        CARACTÈRE JURIDIQUE DE LA FÉODALITÉ ABSOLUE.

   Née, aux IXe et Xe siècles, de la force luttant au milieu de
l'anarchie, la féodalité se donna un droit civil, comme elle en-
taché de force et de violence.
   Dans les lieux où s'établit la féodalité absolue, c'est-à-dire
assez généralement dans le nord de la France, le seigneur devint
le maître de tout ce qui existait dans sa seigneurie : hommes
et choses.
   Dans les limites du territoire qu'il avait conquis, le bénéfice
fut converti en fief (1), ce qui réduisait le vassal à l'état
d'homme-lige , c'est-à-dire d'homme obligé au service per-
sonnel du seigneur. Quant aux hommes libres, pour échapper à
l'oppression et aux violences spoliatrices, ils furent dans la né-
cessité de se placer, par des recommandations forcées, sous la
dépendance du seigneur qui pouvait le mieux les protéger,
et auquel ils offraient leurs%alleux pour les reprendre à titre
de fiefs (2). D'hommes libres ils devenaient ainsi vassaux. C'est
ce qu'on nommait l'inféodation par reprise.
   II n'y eut plus que deux sortes de personnes et deux sortes de
terres : les nobles et les vilains, les fiefs et les censives ou vile-
nages. Dans le système féodal, toute terre et tout homme étaient
dans la dépendance absolue du seigneur. Les formules du temps
exprimaient la chose avec poésie. « Il est seigneur dans tout le
ressort, sur tète et cou, vent et prairie ; tout est à lui, forêt

   (1) Ducange. Clous. V° Benefinum. —Charte de l'an 1025. Tcnebat ex
meloco beneficii sub nomen feudi.
   (2) Réginon, dans sa Chronique, signale principalement la conversion des
alleux en fiefs sous l'année 940.
   Beaumanoir nous apprend qu'il n'y avait point d'alleux dans le pays de
Bauvoisis, (Chap. 24, n° 5).